dimanche 24 mai 2009

PURIFIED

a poem by Pascal Galy, translated by Deborah Kéramsi

illustrated with line drawings water-colour tinted by Éric Porte,

was printed in fifty copies in may 1993

© Les Éditions du Rouleau Libre | Pierre Mréjen éditeur Paris, 1993.



Purified



To be a carp on a table-tennis table,


shimmering waterless carp on a ping-pong table,


being available, oneself lost in severed strangeness,


conveyed at the right time to the cruel ear,


pearly tickle of dry earth,


swordstruck spur,



an abyss slides from whole slopes of phenomena,


to the source encountered of a mountain’s eyes


in the flat desert —


on a mattress of rivers’ cases clouds seethe,


a blanket of steel shards,


liquid auction of waterfall failures of the plain —



The sheet enrobes it, flight of eyes scattering sheds


carnation earth, a fish in a basket.





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vendredi 8 mai 2009

HISTOIRE AU PINCEAU / partie 1

HISTOIRE AU PINCEAU Pour Riki

Zed (ou) Doré joue à l’épée dans la cour de pierre du pavillon, se cache, s’invente des adversaires prétexte à compagnons, fuit en jouant, poursuit un dédale de couloirs de pierre et de pavillons.
Un oiseau s’élève au-dessus des banlieues.

Zed / Doré vue du dessus marche, plus loin : une bande en partie à vélomoteur, et à pieds. Du point de vue de Doré, pavillons fermés ou squattés. Dans la semi-nuit, on l’arrête à un carrefour : “Dans le quartier tu ne peux pas passer c’est notre territoire.” Mais on le reconnaît, il continue, d’autres interpellations, il continue, il se gratte la nuque d’un long doigt, il rentre dans une maison.
Pour lui sur une couche une femme se déforme, se forme, en un bougé de femme à l’atelier ( modèle et son peintre : Picasso ).
Zed / Doré pense. Devant lui une porte s’ouvre. Dans un salon-arène avec des portes en rond fermées des garçons scandent : “des lattes ! Des lattes !” Ils frappent des mains, heureux et assoiffés.

Doré son épée sur le côté, les garçons font un rond autour de lui, les portes sont ouvertes, au centre du cercle un joint qu’il tient.
Doré assis, replié, dos rond, se réveille seul, se lève, se transforme un oiseau, par la fenêtre pour survoler les banlieues. Il s’assoie avec un groupe en rond dans un terrain vague.
Fait hug ! comme ses ailes se plient. Homme-oiseau il répond aux questions : “— Qu’as-tu fais ?
— Je dessine de mon bec mes plumes chaque matin.
— Et le ravitaillement ?
— On vous achemine les mines, les ronds, les filons, les longs pantalons, les ponts, les pines. Fume, frippe et toc, il faut aller à la ville.”

Deux roller-skate dans le métro.

Une contrôleuse hurle : “vous n’avez pas le droit !” Elle crache dans son micro : “Au secours ! Police !”.
À l’entrée ( vente des tickets ) les deux garçons roller-skate à la main, attendent en chaussettes. Pendant qu’elles appellent la police, une autre contôleuse leur dit : “De toute façon vous ne pouvez aller dans le métro en roller-skate ou en chaussettes.”
Doré intervient. Ils s’enfuient tous les trois.

“Silence, science et dé-conscience, ô pluie, usine dans nos vieux rêves, et casse tout”. Doré invoque des mains, qui dansent, un cha-ba-da africain. Des échafaudages autour de lui.

“Mais prenons notre oreille en envol, ouvrons la ville à l’Aventure.”

Avec une petite valise, Doré enjambe des détritus de maison, accompagné des deux rollers. Un éclair. Clash la valise s’ouvre. La banlieue en sort, ses quartiers réservés aux loulous qui en font leur chasse gardée. Maquette entre les jambes, ils s’envolent tout petits en spirale tous les trois dans le décor de la valise, qui déverse ses poubelles et ses HLM. Dans la banlieue, la rue, la bande, clairsemée dont deux mecs qui s’embrassent. Bagarre avec des beaufs. “Ils ne faut rien montrer. Chaque jour se ressemble” disent-ils, les beaufs. De nouveaux zoulous chassent les beaufs. Boivent bière et disparaissent dans la fumée d’un joint. “Cool baba cool punk” chantonne Jean-François Arnold. Des filles et des garçons sautent, fond la ronde, sautent sur les murs, deviennent dessin, fondent fil sur un mur. Les yeux rient dans la ronde de l’air et de pierre, les visages dans la rue, les visages sur les murs. Ronde des yeux. Œil d’aigle. Au-dessous la banlieue. Il fond vers une arrière-cour, reste de ferme, vie ancienne. Des garçons et des filles se battent, se déchirent : crimes. Un enfant se sauve.
L’oiseau et l’enfant pleurent sur la même branche. L’oiseau fait pénétrer l’enfant dans l’arbre. “Tu sais, etc.” Ils descendent dans les racines, remontent dans un HLM. “…Voilà toute l’histoire… des racines aux HLM.”
Cases-valises de Doré, pages d’aphorismes comme Riki sait les faire : seul, quoi faire ? (Prétexte 1) (tes BD d’une page) … Ces cases-affiches sur les murs d’une pièce. Où Doré fait le point : “Toute les strates de ce qui n’ira pas plus loin…”
Ma lyre en or passe en tapis-volant : “Ça m’f’rait bien plaisir que ça continue, la vie vaut la peine d’être vécue.” Doré sort son épée, la lève et coupe le tapis en deux. (faisceaux de découpages).

Ma lyre en or se démultiplie et distribue des piécettes et des œufs en or. Doré gagne la coupe au football… Sur la tombe de Ma lyre en or il va. Chez lui dans la coupe de foot les œufs en or se cassent, des poussins d’or, des filles à Ma laure en ire le harcèle jusqu’à la fin de sa vie. Tout de même il s’adapte, se transforme en poisson pour vivre dans l’eau et meurent les poussins. Il revient sur terre. Singe, poisson, oiseau, sur la plage au bout, un arbre d’or à tentacules et à œufs d’or. Il s’approche. Font l’amour à convulsions.
Le soleil déformé se lève au-dessus des banlieues. Toutes les portes sont marquées d’un Z.



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HISTOIRE AU PINCEAU / partie 2

PLAN

À l’épée dans la cour
Fuite dédale pavillons couloirs de pierre
L’oiseau au-dessus des banlieues
Groupe
Dans la semi-nuit arrestations
Maison : la femme
Salon-arène (les copains, les joints)
Seul dos rond Doré se transforme en oiseau : vol banlieue
Rejoint assis le groupe en rond : questions
À la ville les roller-skate du métro
Cha-ba-da africain sous les échafaudages
Petite valise s’ouvre : banlieue
Bagarre
Chanson, danse dans la rue, sur les murs (ronde des yeux)
Œil d’aigle au-dessus de la banlieue
Arrière-cour : crimes
Un enfant se sauve
L’oiseau et l’enfant sur la branche, dans l’arbre
Pages BD Riki antécédentes
Chambre tapissée de ces cases
Ma lyre en or en tapis-volant
Combat
Oiseau-poisson-singe et l’arbre d’or à tentacules font l’amour
Soleil déformé sur les banlieues
Portes marquées d’un Z



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HISTOIRE AU PINCEAU / partie 3

Dans l’escalier d’une tour, je cours, à grandes enjambées je dévale l’étroite prison de pierres. Ils sont deux, et me poursuivent. Le bruit de leurs pas, brutal et cadencé, résonne et se tait tour à tour, inexplicablement, et résonne encore. Un pas plus rapide me fait vivement me retourner : une fille, je ne sais ce qu’elle fuit dans le même escalier, me jette un beau regard. Corps à corps nous nous précipitons encore plus fort dans les dernières marches.

Dehors la forêt. Nous nous échappons, vite et loin, apeurés, par des chemins opposés. Les chasseurs débouchent promptement de la tour. Dans leur empressement ils suivent de près la fille seule. Je peux la sauver ! Une volonté, celle de voler, grandit en moi. Je m’élève et ouvre les bras. Mais leurs armes à feu, à coup répétés, font de moi une cible qui plane dans l’épaisseur de la nuit, effrayé comme un cerf-volant. Et mes bonds et mes ricochets dans l’air évitent les balles des tueurs. Je délivre la fille du sol, le soulève contre mon épaule. Nous nous éloignons debout dans les airs. Le voyage finit au matin clair… Dans le creux d’une prairie nous nous couchons … Lorsque des monstres hideux sortent de terre. Des couples se forment et des formes se couplent. Un bruissement, une foule en pique-nique se dilate, s’improvise, gaie et confuse, autour de nous. Des voix s’élèvent : “le danger est peut-être écarté… Et puis nous sommes nombreux”… Mais surgit de la lisère du bois, un filet de policiers nous enserre. Je m’esquive aussitôt pour me perdre dans le chemin d’une forêt… Des bruits formidables : un séisme ? Des bâtiments d’école tombent. Des rochers de cartons-pâtes. Des morceaux, légers, restent suspendus aux branches des arbres, s’accrochent à mon pull. Une autre bruit, indistinct… Mais je ne vois rien. Mon chemin s’élève. Je me plaque au sol et m’avance précautionneusement pour voir à la croisée des chemins un espoir (très étrange) passer très vite. Je suis à l’orée du bois, allongé à plat ventre : devant moi une étendue morcelée de champs. Tout au fond de mon paysage, un château… à atteindre peut-être… Mais deux ombres me saisissent. Je me débat et me fais minuscule, et grand comme moi-même… S’ils sont deux, je suis deux… Je ris de les tromper sur ma taille, sans que jamais ils puissent me maîtriser, sans que je puisse jamais me libérer de leur corps et de leurs bras qui se développent dans toutes les directions. Nos gestes se règlent en une mécanique meurtrière et absurde. Nous en reconduisons indéfiniment l’issue.


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mercredi 6 mai 2009

L’être ange jeté / partie 1

L’être ange jeté


IT’S NOT EASY BEING GREEN
Les déchets d’hier n’annoncent pas le printemps,
plus vert.
Au contraire.
1986


DÉMENT CIEL

En pleine fureur romantique du XVIIIe siècle, l’homme, vêtement sombre et viril, l’homme on le pare seulement pour la sacrifice de la guerre, c’est resté bal des lanciers, toréadors, scouts, corsaires.
J’ai perdu beaucoup de temps et m’ai fait beaucoup de mal, parce que moi aussi je voulais réussir, et ne le pouvant pas voulais me détruire.

Un mal fou à trouver une chambre de bonne dans Paris.

Les vieilles copropriétaires de l’immeuble me regardent de travers, des pieds à la tête, sans répondre à mon bonjour, en mars 86, flippées par la campagne sécuritaire de Chirac, elles me claquent la porte d’entrée au nez, Disant qu’elles ne me connaissent pas. Des tombereaux de Figaro dans les poubelles chaque semaine.

Plier tout à leur hypocrisie, se ramène à un commerce d’épicier, dans mon quartier des Batignolles.

Le téléscripteur :
“Les poseurs de bombes… sous couvert d’être des étudiants sans l’sous…”
La vie, la nuit, l’incompréhension sont une succession de superpositions, qui font sens à un moment donné, on se réveille, quand ça fait sens.
*
C’est quand on élimine qu’on est en possession de ses moyens. Qu’ça coule ! (par exemple) (la merde)
*
DICTIONNAIRE
Église ou Dieu : culpabilisateur depuis la renaissance des lumières.
Flaubert : de la bêtise sociale. On vit tous dans un drugstore. Magasin, médicament, alcool, café, épicier, le joyeux progrès associé au marchand d’âge.
*
Les mots sont difficiles
Le mot “honnête” est difficile à employer, parce qu’on a un héritage, la connaissance de l’idéal raillé, dévoyé. Depuis le Moyen-Âge, depuis l’histoire de l’idéal on a la représentation du sens trompé.
Difficile donc certains mots parce que chargés de leur contraire ; même quand on se risque à l’employer comme neuf, comme transparent, maladroitement.
*
Immatérialité totale

C’est pourrir de rire
*
Un homme encule une femme, elle proteste puis caline lui met un doigt dans le cul, la belle-mère arrive proteste s’accole. Un jeune homme au cou d’un beau grand mec : viens j’ai un cul qui baise bien. Un déplacement en rond en avant qui se resserres d’une foule dans un parc ; comme une machine à étage, une attraction, un gâteau hollywoodien, une architecture monte. Déplacement des jambes, pas et oiseaux, foule qui resserre (rumeur), formation s’étagent, pour s’évanouir par le haut.
*
Immatérialité toute
Hug ! Placide !
*
Montage idéal.
Nos cinq sens périphériques, un montage unificateur. Percevoir suivre une forme dans son déplacement, la continuité, pouvoir connaître toute l’histoire passée dabs ce qu’on voit, saisir le travail de l’œil.
L’œil est une oreille fermée.
*
Je ne regarde jamais derrière moi.
*
Pas seulement idéaliste.
Tout à la fois, tout ce qu’on peut être en même temps… recherche d’un possible mouvement dans le temps, le combat, pas le péché, pas de défaut que des possibilités.
Mais ne plus faire de comparaisons, y renoncer, comparaisons entre soi et l’autre, manque artificiel…
C’est l’individu souverain, moi unique, seul fondement. Je suis racine incomparable. On a pas à se comparer à des réalités imaginaires. Authenticité sans comparaison.
*
Une fête aux Buttes Chaumont, je ne peux y aller. Steph au téléphone raconte : soudain on bloquait tous les promeneurs et on mettait la main partout, je mettais ma main sur des tebé (bites) et des tech (chattes), on les plaquait au sol, et personne ne réagissait. C’était des pédés ou pas, probablement, mais on savait pas,
*
Artaud dans le Môme Artaud parle de son cul, que le cul c’est le monde, et que le sien est bien ouvert, c’est bon le cul d’Artaud. C’est bon le trou du cul du monde. On est l’trou du monde. Alors on fait l’tour du monde ?…
— Enculé !…
— Moi ?
— Tu as essayé l’autre jour.
— Eh ?
— Enfin pour moi le plus tard possible, d’toute façon j’en veux un vierge.
— Mais j’suis un petit cochon vierge.

*

J’AI TOUJOURS ÉTÉ LÀ

J’ai toujours été là, comprenant, sachant dans l’immédiat, être, mais je laisse passer, je regarde l’attitude que je n’ai pas adopté. Enfin non je déménage souvent l’âme dans tous les coins. Mais je souris, contraint.
On est toujours le clown qu’on veut pas.

On s’assimile à sa manière d’être un étranger.

Une gêne devient une fiction.

— Comme j’exprimais ma pensée subite à la constellation de chacun : “J’suis dans l’coton. Pourquoi traîne-t-on à cette heure-ci dans la rue ? Pourquoi les Indiens dans la ville, voilà le problème, la ville”. “Ouais, moi aussi” bourdonnent-ils. Retour de conscience collective, je dis un mot, une phrase, devient le mot de tout le monde. Nous sommes dehors ensemble. Danger de l’état policier, t’as mauvaise mine, t’es urbain. Caméléon couleur de pierres, Désiroche.

— J’ai toujours su écouter, je ne réagis pas toujours, quand je le fais, j’étonne, je suis adopté Spirou, justement des gestes saccadés, les foucades de Jean-Pierre Léaud, libre mais trop énervé, comme si cette liberté avait une nécessité trop contraignante… Décidé, Saccadé, décibel, t’es si belle, désiré, déchiré, déciré…

“Java, l’paradis tourne avec toi à l’envers à l’endroit”.

— Une voiture de flics s’arrête. En ce moment des attentas à Paris. Les flics z’yeutent la zone dans la rue du café Fitzcaraldo, repartent, aussitôt, après une voiture de trois Japs regardent, écoutent, jouent à être d’invisibles touristes. Je réalise, j’en au l’impression place de l’Étoile (— T’as pas l’impression qu’une voiture s’est arrêtée pour nous écouter ?
— Si.
— …juste après le car de flics.
— Si.) et cette fois-ci j’ai vu. J’étais trop déjanté pour ne pas voir. je comprenais que les deux Japs c’étaient des flics, c’était comme une fulgurance, ils utilisaient des agents comme invisibles. Interpol. Ces flics s’arrêtent pour toi pour que derrière l’autre voiture stoppe. Les flics s’arrêtent là où il y a quelque chose à voir ou entendre… s’ils n’y étaient pas.

— Et le ballet de voitures passaient et s’arrêtait, un défilement par groupes de voitures qui s’arrêtaient et passaient, j’imaginais que toutes étaient des flics, là où la première marquait la pose, la seconde s’arrêtait, enregistrait. Prendre la température politique de la rue, avec de lourds magnétos à l’arrière des voitures ? Je riais, car enfin la tranche de trottoir avait un tel bourdonnement. J’avais l’espionite. Bien vue et délirante.
Les correspondances c’est beau, trop de correspondances font flipper.
“Java qu’est-ce que tu fais là ? On attend que toi pour balayer la piste.”
— Sachant être bien dans ma peau… et ne pouvant l’appliquer, comme si le démon s’installait là, dans cet intervalle… de quoi interpeller le Seigneur. Quand j’ai cru en Dieu, le démon s’est éloigné de moi.
Je deviens tourlouboulou. Je tourboulboule. Comme cette fille que je trouvais nunuche (que d’autres trouvent aussi nunuche) et qui se met à faire : “Nu nu nu nu nu”, sa petite musique. J’étais déplacé, ne pas fréquenter des jeunes gens aussi prétentieusement modernes, violent, fous.
“C’est pas gentil d’être égoïste avec tes p’tits potes à toi”. J’ai des fictions de peur, pour moi l’enfance et la mort ne font qu’un, les petits mâles j’aurais tendance à les provoquer.
Pourtant j’aime ceux-là, cette bande, j’ai beaucoup d’affection pour eux, ils sont si gentils, si perdus, si plein de vie. J’ai toujours eu du mal à fonctionner avec les bandes. Pourtant je les aime. Mais je les traverse, juste ça, les traverser pour jouer.
Dans un café “le café noir”, au plafond, l’iconographie est véritablement repaire de “rapetous”. Cette jeunesse malgré elle, hypnotisée, se raconte une histoire, de petite nègre illuminée, projette l’avenir, se protéger en fabriquant sa projection, pour un futur de rapetous.
Donc m’échapper, me retirer totalement de cette fréquentation.
“Java qu’est-ce que tu fais là avec ta mine triste ?” Pourtant si ça faisait tellement mal, j’avais tellement de plaisir par moment, c’était la vie à plein, une complétude. “Je cherche un accordéoniste pour m’endormir dans ses bras.” Je suis porteur sain du Sida, je m’empoisonne moi-même, j’ai peur des autres, de leur fiction possible, j’ai vu un noir à sa voiture, j’ai pensé que je me suis laissé enculer par des arabes et des papas moches, je me dis que le diable, etc., c’est affreux, mais, nous avons tous ce genre de fictions refoulées, un vieil atavisme ignoré, d’ignorances, mais qui nous mènent, tous, à notre corps défendant.
— Mais enfin au début je me disais “Qu’est-ce que je fous-là ? Mon corps de désirs, c’est quoi ?” Mais c’est d’abord réagir avec mon corps trop maigre. Une asperge trop peu constituée pour accuser tous les coups, les respirer, les renvoyer ; respirer les choses avec mon corps chétif.
— Pourquoi tu ricanes ? T’as un rictus.
— Suis-je le pédé que tout le monde sait ? Eux jouent aux indifférents.
Après m’embrassent, se lèchent, s’enculent en paroles.


Quand on s’éveille à l’amour…
Les hommes m’ont déçu y pensent qu’à leur sexe.
Les garçons m’ont déçu y pensent qu’à leur narcissisme.
Ils se laissent pas aimer.
— Quand on a été déçu une fois…
J’ai voulu me suicider voilà le mal.

JE SUIS TOUJOURS CELUI-LÀ

J’ai déplacé l’idée de me faire assassiner, par la bande à Yoyo puisque j’étais au cœur d’une autre famille, donc c’était eux, parce que j’étais parmi eux, quelle histoire !, se croire ou ne pas se croire, les deux en même temps, j’pouvais pas savoir que c’était ça la simplicité. Il faut se croire et ne pas se croire. Accepter. La balance au milieu. Riki revient, j’avais oublié de savoir s’il avait quelque chose. Où suis-je ?
Test subi : il n’a rien.

Je me suis réfugié dans l’alchimie d’une maquette de roman-photo Yoyo, radeau entre ciel et terre pendant un an, car mon flip m’a fait tout lâcher.
*
On d’vient fou parce qu’on a peur du caca, on veut pas, on veut rester pur, j’ai tellement souffert de vouloir rester pur.
L’agression des sensations, c’est bon.

CONTRATS DICTIONS

Un canard, deux canards, trois canards…
D’abord je vous raconte.
Un sketche triste, très triste. Voilà c’est fait.
Maintenant un sketche drôle, très drôle. je m’en vais.
Il revient ! C’est l’histoire d’un mec qui est plein de contradictions, partout, en haut, en bas

des contradictions partout, même sous mes pieds, sur cette terre là qui est couverte de contradictions, sous la semelle, et puis dans la chaussure, la peau, ah, ça la peau, je connais pas, et puis mais dedans, dedans la peau, je connais, dedans le corps il y a plein de contradictions, y a plein de contradictions dans le corps, oui,
ah ça fait mal, remontez l’idée des chevilles par mes jambes jusqu’au reste du corps. Y’a mal au corps. Aïe ! Ah ça fait mal, j’ai un mal au corps du doigt de pied, c’est bête non ?

JEUNE DÉSESPOIR

Travail ? Famille ? Patrie ? Quelle hypocrisie. Tout le monde travaille, beaucoup à voler. Son identité.
On vit dans un mode de vol généralisé et tout consiste à voler plus vite, plus fort que les autres pour pas être pris. Les voleurs de la pleine lune film de Iosseliani. (1)

Ma mère gardait intacts, pendant des années, des décennies, ses meubles, mieux qu’elle n’a su garder ses enfants.
Une obsession que le garde-meuble.
Du vol aggravé, accumulé, thésaurisé que ces meubles. C’est du vol d’enfant.
J’ai toujours été volé. Et je sais que comme tout le monde je suis un voleur (au fond, fasciné par cette circulation si rapide). Les hypocrites font la morale. Du meilleur rendement.
*(page découpée)
De la vaseline pure pour les mains ! Elles sont un peu sèches.
*
À surveiller le teint pâle de mes amis, les boutons ou leurs pets si je n’en suis pas pour quelque chose !
*
VAISSELLE À FAIRE

Pour les jeunes il n’y a que des môôôsieurs et des mâââdâmes, entre les deux ils se refusent à exister. Et s’il y avait autre chose ce serait… pédé. Ces petits conformismes situent la norme ; et l’autrement ?, le rejettent ou s’en vantent. Mais leur cul est serré.
Par crainte d’être, autrement qu’un môssieur et une mâdame, ils définissent l’impossible liberté, que par “pédé”.
*
L’enfant du film L’Argentine, interrogé par Schroeter (2):
— C’est quoi la démocratie ?
— Rien.
— C’est quoi la liberté ?
— C’est vendre. C’est voler. Pouvoir foutre le bordel.
— Tu rêves à quoi ?
— …Rester toujours dans la lune.
*
Sans concessions être ce qu’on est, et savoir être en s’ignorant, sans se forcer, tout savoir et l’accepter.
*
Faire face m’angoisse, même de poser les choses comme ça, m’angoisse. Car il ne s’agit pas de cela.
Aux rêves héroïques, aux crétinneries matérialistes de notre époque, qu’être sinon un héros, qui n’est personne ?
*
À la TV débat sur l’école, 80 % des parents se désintéressent des études de leurs enfants, ne dialoguent pas avec ce qu’ils y font.

Le désert de France.
*
“Les enfants n’apprennent plus rien à l’école” s’expriment les plus grossièrement incultes des citoyens. Voilà bien un moyen de circonvenir leur propre insuffisance, et l’école, par où les enfants leurs échappent. Impossible d’y apposer la lecture de leur monde d’épicier. Ils n’ont connu que ça, l’épicerie.
*
La droite engrange ce qu’elle a semé. Elle fait peur, et passe au pouvoir pour rassurer.
*


(1) Otar Iosseliani est un cinéaste géorgien travaillant en France. Il est né le 2 février 1934 à Tbilissi. D. M. fait sans doute allusion au film “Les Favoris de la lune” de 1984.
(2) Werner Schroeter : “De l’Argentine” (Zumbeispiel Argentinien, 1986). Né à Georgenthal (Thuringe), Werner Schroeter suit des études de psychologie à l’université de Mannheim, puis exerce la profession de journaliste de 1964 à 1966 avant de s’orienter vers le monde du spectacle en 1967. Il commence une carrière de cinéaste expérimental, concevant notamment un film (Neurasia, 1969) destiné à être projeté sur deux écrans simultanément.




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L’être ange jeté / partie 2

Toujours le feu de joie !
d’Aragon et de soi, entre
la liberté de l’éros,
et l’échec de soi.

PRIÈRE

Comme j’avais fais des prières pour rencontrer un petit frère, à la recherche d’un grand frère, à la recherche d’un petit frère, ce qu’ils souhaitent tous, mais impossible… je rentrais, j’avais faim, j’ai cru qu’un garçon me suivait. Tiens ?!
Je vais pour pousser la porte, là j’avais prévu de me retourner, un mec me dépasse sur le banc quatre mètres après ma porte, si tendre, s’assoit, fume une cigarette, regardant dans ma direction, le vague.
J’hésite, m’étonne, m’avise et le rejoins. Tu as une cigarette ? Il me l’offre — m’allume — je m’assois. Il regarde ailleurs. Plus beau que toi, oh Dieu, il n’était pas.
Je lui ai pris une seconde cigarette, lui ai lu un poète. Michaux. Toutes les poésies parlaient de notre rencontre, de mon espérance — et circonstanciaient la faim et l’amour. Il trouvait ça “enfantin”. C’était un enfant.
Deux fois je lui ai dit tu peux venir fumer des cigarettes chez moi. Quand il monte les escaliers, je suis devant et le regarde aux tournants, il évite toujours mon regard. Là-haut alors que j’avais marqué tant de respect, qu’il commençait lentement à regarder mes images (suggestives) au mur, je me suis levé et l’ai caressé directement. Il s’est sauvé.
Je déclenche une complicité, un amour, ils sont fans de moi, mais comme disait Laurent, tu annules ta créativité, toutes les sources d’un nouveau réseau, en l’effrayant, en ressemblant aux mauvaises histoires des parents.
Alors que je l’attendais, que je l’aimais, qu’il m’aimait déjà, ne le savait pas mais le savait très bien et se protégeait ; il m’accompagnait, il me tenait la main ; il commençait à me découvrir, peut-être qu’il tremblait, et je l’ai fais partir.
Je voudrais un gazouillis de garçons autour de moi, je voudrais être le garçon aux oiseaux, et tout ceux qui nagent vers moi, au lieu d’en faire des amis et n’avoir qu’un seul amant, l’un d’entre eux, mais en attendant longtemps pour l’avoir, le mériter d’être, au lieu de ça je touche la petite à tous, ces amis, ils ne comprennent pas cette invite… si vite ?
Et je suis triste de provoquer le Départ de mes propres Rêveries, qui me font pourtant accroire l’adoption de tous les petits garçons.
Puisque cet effort cette prière et ce don sont tout à fait sincères, et qu’incroyablement il me faisait don de sa confiance en mon amour, mais j’en suis fier, et je casse la veille union, la belle âme, le beau jour, le bel avenir ; flâner et rire de pleurer, à me souvenir de tous ces dons qu’il aurait partagé, parce que je l’aurais respecté, dans ses demandes, avec le temps.
Mais je suis pressé de mourir. Assez !
Je t’aime petit brun. Tous mes petits huns ? Je ne suis pas assez humble ; je ne vous donne pas, disons je ne donne pas assez à Dieu, ce qui nous est commun, le tout transcendant dans les petites choses qu’il faut appréhender avec doigté. Justement mon doigt sur son doigt — et je vais me branler.
Alar Alar Alarmé ! Désaaarmé !
Je voudrais être l’esclave d’un enfant, son objet pour me punir de ne pas savoir tout asservir au pur plaisir de n’être qu’un, non pas un plus un. Tout asservir, comme elle vient.
Mes questions devraient être éteintes.
Sans douter je devrais remercier cet enfant et attendre.
Attendre — et je déjoue — je panique tout — mon bien aimé.
L’ingratitude de mon histoire — et je me traque, ce vêtement que je ne veux pas, ce personnage que m’a fait l’histoire — qui écrase tout.
OCTOBRE

Jeudi 16 octobre — Deuil de Coluche.
Il désamorçait les insultes, vivant il aurait listé tous les gros mots à devenir des mots doux, raisons de ne plus se haïr.

(page découpée)

Madame et monsieur s’appelaient les aristos depuis la Révolution de 1789, la multitude se donne du madame et du monsieur, ou encore : ma bourgeoise.
*
Les meilleures actrices sont antithèses, elles essaient d’être, aussi la thèse, Huppert, Crawford, Garbo,
25 octobre eu matin

*
Le journal du 18e arrondissement de Paris titre “La peur dans notre ville”, page suivante “Au service des personnes agées” puis “Vos commerçants sont sympas”, en lettrages ininterrompus, infinis, “sont sympas vos commer.”
*
Les nuages au-dessus des toits, la bave d’un volcan bleu, aahh voyager, six mois partir, six mois fixés, j’aime tant la nature, la culture des hommes, voyager, ne pas m’attacher, cette profusion, la partager, laisser couler, le déplacement, l’instant, un itinéraire, un pont, entre les regards,
*
(page découpée)

on m’a forcé la main à ne pas me donner les moyens d’exister.
Les parents et les présidents. Tout pour que je désespère. Je suis aussi votre désespoir.
Chanson des années retouchées

dans ce pensionnat
immédiatement on ne me donna
la chair de poule
je pensais que ça va se passer
maintenant je vous dis c’est assez
j’en perd la boule
Chirac ici ne m’laissez pas moisir
c’est si facile de m’faire plaisir
je n’ai qu’une envie revoir Paris
c’est toute ma vie et j’veux à tout prix
retrouver la botte des CRS
en somme du bon temps
vous direz viens gentil ça va ti mon petit
assez d’remontrances et de leçons
on veut de la danse et des chansons
et si j’m’en vais d’ce Jules Ferry
J’n’ai qu’une idée en tête revoir la vie
ce gouvernement qui a d’l’argent
avec son minois engageant c’est une pimbêche
c’est pervers sous un air puritain
si c’est ça les gens du gratin
j’aime mieux la dèche
vivement je veux retrouver mon chez-moi
ma petite chambre sous les toits
assez de leçons
rue des amours
moi j’ai atterri
j’n’ai qu’une idée en tête
revoir la vie

BOUFFÉE

Si ma vie ne sert à rien, il faut toujours tout respirer dans un petit rien un changement de lumière, dehors, et pour bien apprécier il faut comprendre bien ce qu’un être généreux peut souffrir à cause du reste, qui n’est vraiment plus rien : ce qui reste derrière vous, humain, cette stupeur de ne pouvoir rien, faire pour les siens. Et s’accommoder de tout aussi fort qu’un petit rien.
Moi être l’insecte pour les autres.
Les autres être insectes pour moi.
Ne me gêne pas.
Ce sont les gênes de papa.
Car on sait qu’on est perdu et on le peut pas, on le peut mais ça n’se fait pas, ça se fait mais ça n’se peut pas.
Le soleil apparaît.

Je vis ma perte comme le régime de la politique.
Messieurs, vous avez faillis bien avant que vous ne me donniez le goût de faillir. La lucidité je la réclame sur moi, je la réclame aussi sur vous, que votre propre regard sur vous-même soit enfin clair, ça va faire mal, et bien quand nous aurons tous le même cœur…
Je suis fort, mais ai voulu pleurer le monde — qui charrie et salit mon onde —mais ma goutte d’eau est votre gnougnoutte, ma poésie pour le plein de la peur, qui ne sait pas comment, mais ouvre ses pores. J’adore.

Un écheveau de raisons fait qu’on tient, et qu’on ne tient pas. Trouver les raisons les raisonnements, les réduire au néant parce que c’était géant.
Et c’est là qu’on a le grain de poésie, tout simplement le tamis.

Je fais de moi-même un portrait, mais suis négligent, ne fait pas systématiquement le tour d’une question, sinon dans le temps, et j’espère par cycle, l’intuition revient et se sédimente, s’orthographe. Mais je m’oublie, sur un sujet de parti-pris, je me laisse prendre et n’en donne pas tout le parti. Sauf quelques fois, pour le plaisir du lecteur et celui de mon honneur. Parce que quand j’ai tout dis… mais quand j’ai pas tous dis, la réponse déjà contenue, se formule, j’espère avec votre langue, quand je l’énonce.

Quand je me laisse prendre à la langue experte, je jouis.

Entre l’échec et la beauté, si mince, savoir qu’être flippé n’en est pas moins un fait princier.
… à défaut d’être prétentieux, je me déjouerai tout le temps, quoi.
Et je me suis nié toute existence parce que je n’arrivais pas à cette connaissance ; accorder Dieu et la relativité. Suffisamment tout se voir en même temps, pour opérer de bons choix. mais tout voir de bons choix ? N’est-ce pas un peu rapide ? Téméraire ?
Une décennie de piétinement à s’efforcer d’être la bonne lecture du monde. Enfin aujourd’hui, à moins d’être un canard, enchaîné de surcroît, je ne vois pas…

Nous consulter, de cet appétit de vivre, et de mort, par quel canaux, et quelles raisons, travaille-t-on à l’unité de ton ?
rien qu’un timbre… à vélo sur un fil… ma devise.
Sérieux, et pas sérieux, ne pas s’abstenir.

DANS LE MIROIR

Comme la douleur est songeuse, et voudrait bien rattraper son peu de vie, son beaucoup de mort. Comme la fleur du visage pense son penchement, son maintien coupé, sa tête posée sur le sourire même de la douleur.

Sommeil d’amour, céleste retour, du visage blanc des veillées, retour d’éveillé le sourcil déçu, retour de Yop ! Les ailes abîmées, la dent qui fait mal, le cheveu mal coupé, le front bosselé, la mine… d’un songe total, je me disais en me regardant dans les vitres de la ville, les clients au visages si réalistes, le mien d’une rêverie difficilement rencontrable. Une nouille pour certain. Un ange m’accompagne pour d’autre. Sinon un diable me secoure. Parce que l’impatience ! L’impatience c’est comme l’accélérateur des voitures, n’est-ce pas messieurs les conducteurs, un jeune que j’te m’écrase pour bien lui faire comprendre qui faut pas traverser là, je fonce, j’accélère, je prends mes droits et j’te fais la morale avec ma tonne d’acier.

Parce que l’impatience c’est votre monde. À cette vitesse là on jette tout ce qu’on fait, et tout ce qu’on dit mieux qu’on fait. Le pire, la chiennerie de la matière…
— Tiens !? D’ailleurs y’a pas qu’des chiens pour garder leur matière aux gens. Tout ce qu’on ne veut pas perdre.
Impatients, chacun à sa manière, tout ce qu’on ne veut pas perdre, le fric, et alors d’la merde y’en a partout, y’a qu’ça, de la matière, comme os à ronger.
Ça c’est pour les animaux. mais le vert des forêts, et les oiseaux à la porte des prés sur des fils électriques font l’effort de tout maintenir… mais la parole d’un oiseau de ses plongeoirs invisibles à ses cônes de vent, dans mon oreille et dans l’infini-météo, la parole d’un oiseau dans aussi loin que les nuages mais vraiment, là-haut, on voit toi, le soleil.
Aussi les machines ne sont pas synchrones, en bruissement exact avec le reste pour que tout s’entende… on entend quand les arbres étouffent un peu les voitures, toute la vie s’orkestre naturellement.
*
Se situer géographiquement quand on est dans une maison, savoir où est la carte géographique immense, mentale, par rapport à cette maison où est la forme à voir, de la position du pôle, du globe, imaginer visuellement, facilement, quand on sait où est le nord, le sud, l’est et l’ouest, regarder vers chaque direction, et redessiner la carte que vous avez là dans votre tête, quelle jouissance ! Puis savoir qu’on se trompe d’orientation !… Et les oiseaux qui passaient passent tous dans la même direction, l’océan, vers l’ouest, où la pluie et le vent ont laissé pleins de coquillages, quand plus personne sur les plages.
*
Le cadre de la fenêtre aujourd’hui, les arbres d’hier, les maisons d’avant-hier et le soleil de toujours.
À MAC

Dans un filet bleu blanc
la main voit courir
ce à quoi rien sert

un rien ? un nerf plus des i
point sur la mer
la pluie
le surf à grand-mère

dans un filet bleu blanc
la main voit courir
ce à quoi rien sert
octobre, la St Bruno
*

 Un bras de mec d’une chemise à manches courtes, posé autour de sa nana, un bras offert à tout le monde, une lascivité cherchent d’autres coups d’yeux d’mecs, un mec doux se donne aux yeux des autres, flattés de désirer le même corps.
Lèvres gourmandes, yeux rêveurs, couilles et bite savamment emmaillotées pour tilter les regards croisés, selon les positions du bassin, des jambes, qui dansent, la boule tourne sa jambe sur celle de sa nana qui dort. Rocker, sa fille sur ses hanches, un regard à la ronde quand il va pisser, un regard quand il en revient.
Il doute, il doute le chérubin, et fait la moue. Le sang qu’il charrie dans son beau corps l’intimide. petite main de la fille sur sa belle grosse nuque. Et lui l’eunuque, regarde, autour, en ayant soin de vider de tout sens son regard.
La fille ressemble au rideau qu’on tire sur son mec. L’œil de la fille que tu surprends quand elle embrasse, est moins généreux que celui de son mec qui se laisse regarder, à ravir.
Autour du cou, à la chaînette, un anneau et une raquette de tennis — les siennes de balles pour le tennis des autres.
RIEN VOIR FAIT ADVENIR

Quand l’attention, l’intuition mène à la déclaration ouverte de désirs, ces parfaits inconnus, le fait de bien voir fait advenir. On devient ce qu’on voit. La vision transforme au fur et à mesure qu’elle voit bien.
*
L’image du père est réconciliée puisqu’il est aimé ; dans son rejet même on le refonde homme d’amour.
*
Crevel, Crevel, donnes-moi du Crevel.
Grand-mère, grand-mère, donnez-moi du grand-mère, géniale !, de celle qu’on préfère.
*
Quand je suis bien, je fais le dégoûté quand je suis pas bien je fais le beau.
Répétez avec moi : quand je suis bien, je fais le dégoûté quand je suis pas bien je fais le beau.
*
“Crevel !? Intéressant, mais voilà où ça l’a mené la révolution et la poésie. Suicidé !”
Mes contemporains ont tous peur, et prennent en contre exemple les risques de brûler, à tout relier et à tout tendre.
Crevel, les pieds dans le plat.
*
Plus d’attentats, ils le savaient, négociations en sous-mains, dette du shah, vente d’arme à l’Irak, pétrole bon marché, mains, mais continuaient à faire fouiller tous les sacs, quelquefois ils s’adressent aux citoyens comme à des chiens — FNAC, BHV, grands magasins.

Le gouvernement négocie une trêve — officieux — et met les français sur le grill, accepter l’ordre de la police partout. En 86, les élections gagnées, ils ont fait se déployer sur toutes les routes et dans les villes de France des policiers. Mieux qu’un spot télé et une image subliminale. Il n’est plus question dans ce contexte, d’avoir une idée différente ou progressiste, impossible le débat d’idées, le racisme des idées c’est nouveau ça, s’auto-censurer, se taire, avec les attentats, les valeurs de 68 sont suspectes. C’est le plus grave, constamment un rappel à l’ordre, comme quoi la démocratie serait étrangère à un état de guerre.

Du chantage à la guerre, c’est bien ce gouvernement qui nous fait la guerre, la machine de guerre du R.P.R. : Rassemblement pour le Pornal Rigolo.
*
Les français romantiques, on ne le sait pas assez : un contentieux. On est perçu romantiques, de l’étranger. Et l’on se ment, oubliant le romantisme noir des origines, pour un romantisme rose. Une déviation du sens. On s’aveugle. On s’aveugle. On vit une époque affreusement matérialiste et affreusement romantique. Un romantisme qui couïne.
L’homme du 18e romantique, et du 19e matériel, est devenu l’individu seul, qui s’étrangle (d’idéaux) à l’ère marchande, à la mort de la religion et de l’identité communautaire de village. L’homme est seul face à lui-même, au cosmos.
Le romanesque c’est morbide et ça m’éveille.

*

JEUNE ET INNOCENT

Un film d’Hitchcock développe touours le point de vue de la femme romanesque, qui a peur du phallus de l’ordre, et invente l’histoire, tisse le scénario de ses manques.
Yeux dilatés face à l’écran, elle rêve, l’histoire.

La rose pourpre du Caire, de Woody Alen.

Le rayon vert, d’Éric Rohmer.
MILIEU DU TERRAIN

Mitterrand : tout pour la recherche qui assure la conscience individuelle. Mitterrand signifie milieu du terrain, en vieux français.
*
Quand je faisais, au début, l’amour avec un mec, j’avais Dieu en moi, je découvrais la création elle-même.
*
Il était toute la faiblesse du monde, il avait tellement conscience de toute la faiblesse du monde, il la voyait tellement, la sienne, mais il était le monde, merveilleux, beauté du monde, la fraîcheur du monde.
*
“Il n’y a que la preuve à faire de ce que l’on pense qui présente de sérieux obstacles. Je continue donc mes études.”
Cézanne.
*
René Daumal écrit si bien dans le Contre-ciel : dire non, refuser le vêtement tout fait, le pli des parents, c’est être au diapason du monde, c’est être normal que de dire non à 16 ans parce qu’on est spirituel. Dire non, c’est à dire oui — au monde.
*
Une semaine sans sortir quasi de chez moi. Un tour au soleil du square des Batignolles mais il fait froid. Je ne peux pas par moment assumer de faucher dans les magasins pour survivre, d’être un auteur, un créateur qui ne peux pas communiquer. Misère le poète.

Cet après-midi, rendu la maquette de Yoyo à Annie Merlin qui donnera la finition professionnelle, exécutera une maquette d’après la mienne, qu’elle complimente beaucoup. Mais elle reste à faire, elle est indispensable. Tout pour plaire à un éditeur, l’impression clé en main. Drôle d’impression effectivement, comme dit Georges j’en dors pas. Pour autre chose. Mais du coup, après une semaine reclus, sachant le RV avec A., me reviennent … que j’aime S. par exemple, une vraie émotion pour lui. Et puis je rêve, je rêve.
Recueilli, en soi, on se ressemble tellement plus que quand on se donne en spectacle, aux autres, à l’écriture.
C’est toute sa vie, la même émotion, mais tellement compliquée par les méchants et les hasards, par les réacs et les pétards.

POLIR

Mystère — ne pas savoir.
Frémir — ne pas savoir ce dont on se doute.
Le roman-policier est le bon état d’esprit, la curiosité d’une civilisation à même d’identifier l’inconscient. Plus de peurs excessives mais une curiosité en éveil, chacun limier de soi et des autres, dans les ténèbres.

Ô

Selon la situation, la personne se flatte du monsieur, la personne quémande du madame, surtout le respect totalitaire du “j’t’en donne” les acquis de la révolution, s’appeler comme des artistes, “il en faut”, dans les commerces et “merci” comme une prière, selon la situation, la perruque ; ô perruque ô parents.




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En rêvant dans une île / Une île à la vitesse de la terre / Bleu

Une île à la vitesse de la terre

Je voyage. Présence des voyages d’hier à aujourd’hui.

C’est dur, de voyager à sa petite vitesse dans un train. Il faut le savoir ou bien rêver ? On trouve ça triste quelques fois un train qui passe.
Toutes les utopies de mes voyages passés ! Aujourd’hui c’est dur, un filet au ballon rêvé, à l’oubli.

Les usines sont les plus belles architectures. Grands cubes striés d’alliages de fer, immenses boîtiers légers, œillés de verrières ; carapaces d’insectes, gonflées, de l’intérieur, vers le haut dominateur.

On va pas me reprocher d’être planqué, parce que j’ai l’œil à tout !

« La lumière de juste » c’est la librairie rue des Moines dans mon quartier parisien. Un avion détourné, trois mémés groupies s’informent et pépient autour de l’épicier qui répand la parano.
Un jeune homme pris en flagrant délit de fauche d’une revue y est retenu, à l’heure où tout le quartier défile ; on lui fait la leçon, discours, salon. J’ironise, on me retiens aussi. Mon amant, le jeune garçon qui les aide par intermittences, me confie : les vieilles planquent souvent un magazine volé dans leur journal. Moi j’dis rien.

De longs toits fin d’une longue maison filent, en éperon sur la colline des hommes, terminent l’île. Voyager ? Il faut rêver à ce qu’on voit, le front collé contre la vitre froide.
La nuit, c’est familier.

D’un vieux compartiment S.N.C.F., la fenêtre : l’écran, du flou, de l’incertain, des transparences habillées dans l’espace, des bouts de rien, une géométrie de paravents différés, remplacés ; des clignotants, des dentelles d’arbres, et du vent ! Des vacances à la fenêtre, 4e côté où tout peut être redonné.

J’écris parce qu’il me souvient dans des interstices des paysages de nuit par la fenêtre du train troué, traversés de ponts de lumières, de coudes, relais des parties d’un corps, clip architectural de la terre, décor à vue de la vie, impressions d’un développement (physique) d’une mémoire sculptée de fiction.

À la douleur un seul remède, la confiance. Confiance dans ce qui va arriver. Chaque homme a pour crime de tromper la confiance qu’il a dans le monde. Le mal c’est ça.

Déçu f’peux tout créer.

Je ne veux pas d’histoire d’amour. Je veux l’amour.

Je ne veux pas d’histoire. Sinon des Aventures Autres. Jeux d’Artifices !? Remake des Enfants Terribles. Si l’enjeu est menacé c’est qu’il y a une histoire.

Pour protéger l’enjeu de nos mythologies, des multiples possibles, « je ne veux pas devenir » chante Élisa. Lili la complicité tu la veux à présent petite et voyageuse ? Je veux ta foi pour rêver, aux multiples possibles. Le feu est partout. Voyager. Un centre à l’extérieur, en pays étranger. La tête malléable, mille foyers.

… S’habituer à être fluide, l’aimé qui accorde.

… pour être flippé je suis décontracté !


BLEU
Des petits bouts de châteaux en Espagne, en stuc, en briques, jouets cassés, faux, compilés, salis, oubliés collent aux maisons brunes et vertes de pierres végétales.

Signes. Les français surveillent ton degré de dignité, affichent leur peu de liberté sur eux, en surface. Les espagnols sont simples. Ils t’observent pas des pieds à la tête. La grimace, leur dignité est muette.
Apparente indifférence muette des peuples, en voyage.

Le circuit touristique est ringard, nul, bordélique, désuet, et cher… Le tourisme espagnol, étranger au pays, c’est des vieux stocks de Prisunic vendus au prix fort.
Le vent s’engouffre dans le ventilateur du train, hurle comme une scie.

L’après-franquisme : le tourisme.
Le pays est ailleurs.

BARCELONE. Je compte et recompte mes sous passant d’un trou du budget au budget retrouvé, décompte minutieux de ce qui est perdu, une consolation pour ne rien perdre, de le journée en segments, en heures de dépense ; la vision méthodique du temps décompté d’argentier. Juste une ville : à vous bouffer.

Les garçons d’Espagne ressemblent à tous les garçons de France, toujours bruns-rare rouquin-Reno-doré-je pense à toi à qui j’ai dis je pars pour mieux t’approcher.
La Sagrada Família. En grimpant dans l’une des deux plus hautes tours creuses d’escaliers en colimaçons juxtaposés, en levant la tête ai dessus d’un couloir d’espace vertigineux, levant la tête, un crachat, de l’eau sur ma tête, un petit garçon rit de sa farce plus haut, s’éclipse. Bénédiction ou insulte grave ? Furieux, indécis, je suis ravi.
SUR LE BATEAU.
« — Alors toute action est un mal ? Répondait Kim.
— S’abstenir d’actions est un bien, sauf lorsqu’il s’agit de s’acquérir du mérite. » Kipling.
Avoir confiance même quand ça n’est pas dit ?
Élégant. Voilà c’que veux être. Mais la vie n’est pas élégante. Alors je fume comme un dératé. Je cherche des fatigues à me perdre.

(L’île en vue)
Dompter le bleu,
le liseré bleu,
le bleu plus éclatant le long de la côte
jusqu’où vont les baigneurs.
Dompter le rêve.

D’instinct ne pas s’occuper du circuit obligé des autres, faire ce qui plait, aimer ce qu’on fait, et ceux qu’on rencontre sans les chercher.
Ce qu’on aime chez les autres c’est la liberté. L’autre, c’est une forme personnelle de liberté.

J’aime les sexes mais j’aime les gens asexués.

Intuition d’un voyage initiatique, christique.

Christian, passeur, chauffeur de grand hôtel à Paris, est venu à moi entre deux bateaux et me conduit à travers toute l’île à moto, à la recherche d’elle. Partager une maison. La rejoindre.
Le tour de l’île, minuscule, miettes à touristes. Adresse postale, courrier-retard. Écho de son périple, enquête, une journée, le bon chemin, fine ligne de sable, à moto, à travers champs la nuit, si familier, infini.
Au Blue Bar, en travaux. Au bord de mer.

Sami, mignon avec une tignasse enturbannée, une petite dent de travers, une tête de petit garçon, caressant.

Christian — T’es pas doué… qu’est-ce que tu sais ?… à part trouver les garçons mignons.
Sami et Jean au bord de mer, deux gentils garçons en retraite, habillés de pulls des poubelles, mangent des coquillages et travaillent.
J’ai sucré mon argent de poche en trois jours, riche et pauvre c’est pareil. L’épicerie du monde c’est le vol.

Nous sommes des enfants.

Plages et prairies confondues. Les fleurs sur le sable.

Ici c’set la jointure orient / occident.

Pour les hippies c’était la halte, aller, retour. Rester, partir ? Ne pas savoir que choisir ? Mais le déracinement c’est notre liberté. La végétation, quasi-inexistante, l’est, à cause du vent.

Les champs en fleurs ressemblent à ceux de Bretagne.

Elle a trouvé un gérant qui nous enjoint à se restaurer ensemble avec Christian sur le port. Un carton ! Christian et moi vexés.
L’impression de payer la note à deux. Le gérant du Blue Bar draguant des clients ne paie pas. Elle — au petit plat —trouve ça normal.

Marie L’or comme toutes les filles, veut parfaire le garçon, rendre sa grossièreté moins lourde, veut le changer petit à petit, sans rien dire, le cleaner. N’ayons pas peur des généralités, c’est comme si les femmes s’identifiaient avec l’amour que les garçons (mais qui nécessités maintenant s’aiment) et toujours une fille veut transformer le garçon, le parfaire, discrète. Marie L’or et moi on est semblables. D’un trop d’imagination on voudrait en faire quelque chose, et on est déçu, de n’avoir eu que peur, que le résultat n’est rien. Le comble c’est qu’on est déçu.
Se retirer sans se détourner des ses principes, impossibilité d’agir, se retirer, noble.
Réveils fantastiques.
Sami : à dix ans j’étais très amoureux mais triste. Toujours quand je suis amoureux, faut que la personne soit inaccessible… Puis la grosse Véro… amoureuse de moi… quand je relis ses lettres, je m’en veut, je lui faisais des trucs, je referai plus. Je me suis promis d’aimer la prochaine fille. Je me suis dis le prochain qui m’aimera, une fille, un garçon, n’importe ; je serai attentif mais on peut pas, on est pas Bouddha.
C’est pour ça que je zone, je voyage.
À l’école j’aimais pas la façon d’enseigner, l’esprit, pour ça l’école, j’ai quitté. Quand on est enfant, amoureux, ça s’passe mieux. Plus tard le monde autour c’est dur.

Moi : plus tard c’est encore mieux, aimer l’autre c’est accepter son tempo, faire avec le tempo du monde, se réadapter. L’inaccessible devient accessible, une complicité si intime malgré l’impossible. C’est unique. Lili.

Ah les filles ah les filles
faut toujours les attendre
Ah les filles ah les filles
sont-elles toujours tendres
Ah les mecs ah les mecs
eux ils veulent être tendres
Ah les mecs ah les mecs
qu’est-ce qu’ils peuvent bien attendre ?

Intime apprenti du nouvel an 86, j’étais le presqu’ami d’un cinéaste-débutant, victime d’un premier amour… Je le connaissais mal, mais il s’avérait immédiatement ce soir-là que j’étais son seul confident, son intime parmi ses amis.
Et je faisais le va et viens entre sa maison nichée dans une grotte, et la maisonnée plus bas où des jeunes pus “rue” jouaient de la musique, amoureux que j’étais d’un ange qui se trouvait dans le train pour venir. À l’aller on se regardait, lui mascotte d’un groupe de plus grands, il m’offrait en regard sa silhouette contre la vitre, le soir au coucher de soleil.
Je l’emmène à la fête de la maison d’en Haut puis à la ferme des parents. La victime passe. Et au lieu de donner mon adresse à l’enfant, moi toujours prêt à me l’effaroucher… il s’en va.
Puis la sœur de la victime me dit : t’en va pas ? c’est dommage pour toi — tu travailles plus avec lui si tu pars tu perds tout — Il est flippé — Pars pas.

Pris entre mes deux destinées qui m’échappent, je m’enfuis et m’endors avec la première voiture venue, qui me mène au réveil juste devant chez moi à Paris.
Confident des privilégiés, et des innocents de la rue, mon incertitudes au malaise des premiers, et au confort malaisé des seconds, font que je ne me situe pas, et mon romantisme me fait fuir.

Je voudrais tout, et tout est imparfait, et tout est de nulle part et repart. Je prend comme une prière, et je jette.

Impatience d’aimer un garçon. Je ne suis plus ferme, je cesse, de trop de possible, je ne sais plus quoi tenir. Enfin j’affole, j’intimide. Mais je garde près de moi, quoi qu’il arrive, l’amour des petits.

Marcher avec eux deux la nuit sur l’unique route goudronnée de l’île qui la tracerse de part en part, sous la lune et l’immense coupole.

L’île. Le café La Founda Pepe. Babs. Le parasitage du parasitage, dit Jean. Le décor habituel. De la vie. Et moi avec l’ange. Qu’est-ce que je fais avec l’ange ?…
« L’ange-choux fuck me haha »… me répond un cadavre exquis que j’ai proposé à Sami, Jean, et à leurs amis punks.
— J’ai eu l’impression d’un bad trip, me dit-il, j’ai eu le flash que ça t’a pas plu.
— Oui mais c’est égal, les clichés obligés, l’ironie de la vie surexposée avant connaissance, graffiti punk.
— Oui la provoc des provoc, ça a ses limites.

Vagabonds de la route, des villages, gentils zonards des faubourgs, poulbots de la Foi, avec des sourires amicaux…
— Ah bon ! Et toi, la foi ?
— J’suis un voyageur, je fais pas avec le monde.
 Je fais ce qui me plait même si ma place est petite. Artiste ?… je ne sais pas me vendre… et la retraite est nécessaire… continuer à être amoureux, et protéger le rapport à la connaissance. C’est quoi ta foi ?
— Se poser des questions ; je suis seul, j’ai plein de potes, mais j’voulais plus assurer, dans une bande, tous accrocs les uns aux autres.

Christian est jeté par l’homme en place. Chrisian m’en veut un peu de rester. Il s’en va content et déçu.

Ils étaient quatre enfants, Sami “l’Ami de tout au monde”, Marie L’or, Pascal et Jean. Amour et connaissance ?, ils sont caressant. Ils ont l’amour du petit, tout dans un petit endroit, le voyage, le vent.

Ils étaient quatre enfants et un papa, le Grand Michel de 50 ans à béret rouge et à grosses lunettes, de se cacher vieux bab pied-noir, patron qui méprise et sous-paie ses deux ouvriers, mes amis :“ ils puent ”.
Elle m’invitait à partager une maison, on partage le Grand Michel. “Inspecteur des travaux finis”, dit Jean. Il vit à crédit, folle, folle, folle à s’installer, il n’en revient pas lui-même, et rien ne compte que son club aux allures de Saint-Tropez.

Marie L’or petite fille porno très maîtresse femme du patron, tient son rang, revenant d’un dîner dans la colonie française — nombreuse — pleine de condescendance pour les “petits”, campagnarde sincère, avisée et tourmentée, si jolie… (très contente de nos rapports “intellectuels”).

Elle se dit en sécurité, mais la situation est périlleuse de me prêter un peu pour le retour. Ou pour rester. J’ai déjà mon billet et plus d’argent. “J’aurais pas dû t’inviter”. De là à surveiller ce que je grignote, — affamé, dit-elle.
“Ne voyage pas, reste à côté d’un grand magasin pour voler et te faire nourrir, ne voyage pas”. Une maman.

Voyager pour faire le point, avec en rapport le système métrique !
Libre à quel point ?
Rêver sans rien posséder. Rêver avec les garçons. Les instruire, les nourrir, les aimer. Être aimé d’eux dans l’immédiateté, la netteté.
J’suis toujours complice de l’ange. Ils sont complices de mon ange. 19 ans à recommencer, le sexe noueux comme une racine, la modestie gracile, l’espoir comme un nonchaloir, une douceur bleutée.




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En rêvant dans une île / Le vaisseau / Pédé / Entre acte

LE VAISSEAU
“ENTREPRISE COLONIE DE VACANCES”
CONTRE L’ARGENT
Marie L’or et Grand Michel ne rêvent que de s’installer. Jean, Sami et moi, pas du tout.
Michel souverain n’en a pas la qualité. Jaloux que les coulisses lui échappent. Chacun a sa place. Je menace son jeu, sa répartition des rôles, je passe d’un monde à l’autre. Ma copine. Mes copains. Mon hôte. Je sape son monde.
“Faut pas laisser tes affaires de toilettes près des leurs, ils vont tout saloper”, dit-elle, informée.

Je me suis fait un copain avec les deux “ouvriers”, les deux “paumés”, très spirituels à mon goût.
Elle à qui je demande si je pourrais rester travailler : “oh je ne sais pas, je ne sais rien, moi j’ai un tout autre trip, une autre aventure”… Après la panique pour me prêter un peu pour rentrer, ce qui justifie les horreurs à dire, ce qui prouve la personne, les spéciales lunettes :“j’me débrouille très star à lunettes”, elle me prête un peu d’argent avec pompe.

Et moi prêt au départ, Sami me dit, “reste dans la vieille tour en ruine, on t’apportera à manger”. Mon esprit n’est pas encore fixé, mais je veux rester. Retour de Michel. Tu peux rester deux jours, habiter avec Sami et Jean, gagner le droit de rester en aidant l’après-midi à travailler. Je suis content. amis de tout au monde. j’ai tout à apprendre d’eux. Ils sont mon maître. si j’ai prétention à instruire les garçons, c’est que d’abord ils m’instruisent.

Savoir hennir.
Veiller à la famille.
Une cabane au bord de la mer.

Je délaisse ma copine installée avce le patron, pour aller avec les garçons, aides au patron. Vacances ! Quelque soit le lieu il m’arrive toujours les mêmes choses. C’est ici exemplaire.

Eux c’est le partage, elle c’est le décompte.
J’aurais voulu être magicien.
T’as pas besoin de la magie dit Jean. Puisque tu es médium dit Muriel.
J’ai l’intuition par un détail, une couleur. pas besoin de trafic. D’ailleurs je me ferai bouffer par les esprits, dit Muriel.
Don de Salomon, l’odeur des cheveux.
Hanté de vouloir être metteur en scène.

PÉDÉ : LE GOÛT DE L’ENSEIGNEMENT ALTÉRÉ
    PAR TANT DE RÉVÉLATIONS.
Je vois là, Marie L’or faire des scènes horribles pour trois centimes à Michel, des dépenses ridicules, la peur de la perte ; que les choses ne s’écartent pas d’une méthode, qui planifie tout, la débrouille*, en argent serré.
Voyant sa grimace à propos de mon voyage pour le retour, les deux garçons s’avançaient “ML on te rembourse, Michel nous paie dans huit jours”. Elle a grogné. Le lendemain elle soupçonnait le Grand Michel d’être un imposteur, un incapable, un porc, elle le faisait vivre, il lui devait de l’argent, elle flippait, elle me disait je te hais, je te hais, Michel connu de toute l’île, et soudain elle est en péril : l’associé de Michel ne viendra pas, “je serai sans argent”.
Je lui ai dis son apparence de maîtresse-femme dure compagne du patron, qui tient son rang. Et des crises, pour le justifier tenir. Je lui ai dis, elle a engueulé violemment Michel de se comporter en patron. Elle me dit :“tu m’as ouvert les yeux sur lui”.
C’est vrai soudain j’étais un peu lourd, le Grand Michel lui devait un maximum de fric! Je me joue d’elle. Quand à moi j’avais apporté un peu d’herbe, volée à Paris, que je voulais vendre sur l’île, que j’avais offert à Sami et Jean, qu’ils voulurent m’acheter, à crédit. Je me joue de moi.
Sami et Jean travaillent l’après-midi, je m’balade dans l’île, fais les courses, royales. “Avec 2 Fr 50” dit-elle.

On est revenu par l’île malgré la laideur à touristes, l’envie pour certains d’y rester une semaine (comme moi) peut devenir douze ans.
Je suis amoureux de l’idée de l’île, goût de délaisser habitudes et géographies, pour tout réapprendre, redécouvrir sur une île, sa finitudes et ses multiples chemins, l’idée d’une île qui les réunit tous, ce point agrandi, au bout de l’Europe, avant l’Afrique.
Comme on comprend tout très vite, avec une pile de détails complexes, comme un baluchon sur l’épaule.
Ici on revit la même chose qu’ailleurs, mais avec une disponibilité autre : cette idée de répétition, d’éternel retour, dans de meilleures dispositions, fait rêver.
Rimer et rater, on peut le revivre avec un bonheur et une circonspection supérieurs.
Les allemands là où il y a le plus de monde consomment ostensiblement. Très conquérants ils achètent tout, il y en a toujours un devant toi à la caisse.
Jean
— Si on allait nettoyer les plages aux milliardaires pour trouver ce qu’ils
 perdent ?

Aux Baléares on a tout : les villages à allemands, les champs des paysans, plein de petites choses, les plages de [-]is, les ascètes.
Sami c’est la Vierge et l’Enfant réunis. Un gavroche toujours plein de potes (“un bateau avec des enfants” dans ses rêves notés). Mousse à tout faire à 17 ans dans le trafic de ma Méditerranée. Féminin (“ma sœur porte mes vêtements” dans ses rêves). Travailleur dans les champs de la Creuse. Avant tout un petit garçon qui a beaucoup zoné, qui a des tendresses, une manière de pencher le cou avec une grâce timide, “qui retient le côté négatif des choses” dit Jean, “non” dit Sami, il sait tellement de choses, quand il penche c’est pas une pose, il écoute le monde avec sa fragilité, son innocence avertie de l’écho difficile du monde. Et il est modeste, chaleureux, très doux, je voudrais rester pour lui. Je l’ai cru très fort, si fort.
Ici c’est l’Afrique. À 200 km de mer en face. Sami en rêve. Il a un côté africain. sa langueur légèrement voûtée mimétisme au paysage, est toujours en voyage. Son négligé de cheveux, de vêtements, la maison qu’il transporte, sa nonchalance, toujours sur la route, une famille avec lui, volubilité de sa voix… pérave* une épave sur les rivages flous, par choix, pour partager son savoir, de vivre.
Sami-Rimbaud
Madone secrète, ou gavroche-yoyo, Sami, sur le lit un caillou roule, ami.
Un Nain Jaune, hollandais, albinos warholien, et Nic gentil punk belge campagnard, et Mona brune îloise et française, et la frime sympathique et dangereuse d’un Coluche punk de bonne famille anglaise, au café récurrent le soir les amis de Sami et Jean.
Ici on pense toujours au voyage qu’on y fait, au voyage qu’on a fait pour venir, aux voyages qu’on a fait avant de venir, au voyage de la vie. On oublie totalement pour se le rappeler régulièrement.
Castaneda, livre-poche de Sami et Jean : les ennemis d’un homme de connaissance :

— la peur
— la clarté
— la puissance
— la vieillesse (lassitude)

Photo. Dans l’instant, posément, t’as tout ton temps. Dans l’instant.
Il y a trop de paroles. Et trop de paroles dans ma tête.
La simplicité c’est : je n’ai pas de choses neuves à dire, que la science d’être à vivre. Prend ton temps dans chaque acte, mais de suite.

Ici je parle posément français. On me répond posément en espagnol.
Ici il y a toujours du vent contre nous, dit Michel.
Je l’avais su avant, et pensé fortement comme image, je suis le vent.
Marie L’or est délicieuse, un peu cochonne. Elle est venue dans notre cabane à tous les trois avec un joint. “Je m’ennuie avec mon homme et son associé ! 50 ans ! Je peux pas, je peux pas, j’ai cru mourir, et j’ai renversé tout le déjeuner. Je ne sais pas être barmaid du bar. Et au restaurant ! Des discussions ! J’ai fui ! Ils sont pas méchants ! Mais maniaques réacs. De grands singes.
Marie L’or de retour, animée petite fille, parle de ses plans culs avec naïveté et franchise, met tout sur le même plan, au même âge d’enfant, voit avec des yeux d’enfant le monde des adultes. Conteuse.
Toujours Marie L’or dessoûlée dit je suis nulle, toujours merveilleuse.

Je lui envoyais une chanson voici longtemps :

Dans la marre
(marre ! comment fait-elle ?)
Marie cherche de l’or
Avec un tamis sa voix,
sans peur d’être noyée, attirée
par les vagues lubriques
les remous tentateurs ;
son désir
d’arriver retraitée
dans des îles ensoleillées
mémé sage pour des conseils pas sages (passages) ;
Oh c’est le nez du lapin,
le pied de l’oiseau,
soulevés, c’est le met à l’anis,
le met à l’anus ;
l’univers sert
un 15 juillet
les projets sans serres
d’une chatte
qui a vu l’envol sur terre.
Elle ne se taira plus
depuis longtemps déjà
voyage la fille
vers l’île drue
sur la mer
après qu’il ait plu.

Il y a eu justice, la juste part se recommande auprès d’eux, Sami et Jean. Le Grand Michel leur a parlé la veille, pour la première fois. Il s’étonnait que tout le monde aille vers eux.
Michel, lui est intelligent, me croise regardant obstinément le sol, alors que je cherche son regard, et m’ayant dépassé il dit de dos
— Salut ! Ça va ?
— Bonjour !, pour couper court, continuant mon chemin.
J’ai tout fait pour lui marcher sur l’extrême bord des pieds sans les écraser.
Et toujours lui ; à te poser : — “T’as un bouton là c’est quoi ?”, en riant.
Marie L’or : — “J’ai pas dit trop de choses hier ?”

Sami me dit que ça l’intéresse pas les films, les actrices, du moins il connaît pas ; pas encore. C’est : pourquoi ça ? Inutile !?
Puis lui : — J’suis libre, j’peux partir quand je veux demain ! À moi. Le premier soir seul tous les deux. Le jour où se décide que je reste encore sept jours de plus. Le soir on se couche tôt. Très tôt. On éteint.
Sami a le dictionnaire des petites fleurs et deux petites sœurs.

Le lendemain.

Sami — Pourquoi chercher la connaissance, on est pas sur la route, pourquoi créer quelque chose d’autre, et toujours, pourquoi ?
Jean — La connaissance, ressentir parfaitement, pleinement, pour un arbre, une maison, c’set tout…
Moi — Ça n’est jamais suffisant de créer… Être et ne pas être c’set aussi vrai.
“Perception instinctive réfléchie”, dit le Yi-king.
La connaissance c’est partir, et ne rien souhaiter d’eux.
Ce matin lapsus : je dis : — Tu me liras tes lèvres ? Euh tu me diras tes rêves ?
Plus tard Jean lui évoque des copains.
Sam — Celui-là je lui met un doigt dans le cul, cet autre deux doigts, ce troisième trois non quatre doigts.
Moi — Et moi ?
Sami — Pour toi je serai calmé.
La connaissance par l’inspiration immédiate du monde sans rien posséder, c’est pas suffisant, si on est pas amoureux. Le rythme du monde tu l’as si t’es amoureux, le rythme de l’amour t’apprend le rythme du monde.
Et je suis amoureux de Sami. Lui s’en fout un peu. J’en ai marre d’ici, de tous, de moi.
Ce disant je le retrouve seul dans notre maison. Et je boude. Lui ! Je veux fuir.
Sami — “T’as qu’à laisser corner* man.”
Moi — Mais c’est encore du travail.
Sami — Quand je suis amoureux, je suis impuissant.
— Je voulais partir parce que j’apprivoise toujours un enfant, pour brusquer ma demande. Mais j’apprends :“Laisse corner man !”
Je pars ou je pars pas ? Je pose en commun mon problème, la guerre à gagner, le réceptif jamais étal, l’humeur en montagnes russes. Je fuis par courage et / ou lâcheté.
Yeux de chien battu de Sami : — “Le Yi-king (livre des oracles) t’as dit de rester.”
Marie L’or m’avait dit : “C’est lui qui tient le navire ici. Il me réconforte toujours d’un regard. Avec Michel c’est lui qui aplanit tout, et fait le travail.”
C’est mon guide.
Moi — Je peux te toucher ?
Sami — Non mais je veux qu’on discute qu’on soit copain.
L’amour physique c’est bien, mais la personne est sublime, inatteignable, c’est mieux.
Moi — Oui mon amie Élisa, cousine Lili l’être que j’aime le plus au monde, j’ai pas fait l’amour avec elle, par contre j’aime lui toucher un téton. Elle dit, tiens y’a une main, ou elle l’ignore.
Mine souriante, rire même de Sam.
Trop dire les choses ça déboussole ! En dire pas trop, mais toujours assez par rapport à beaucoup.
Sami c’est une caravane qui passe. Un goût du désert.
Se laisser guider. La situation est fortuite.
Ici tout est miniature et on a tout. On comprend tout.

Marie L’or confie : l’associé de Michel est amoureux de Michel aux airs de folle, il le suit partout, lui met la main sur la cuisse. Des hommes amoureux des hommes sans le savoir — yoyo d’ado — je le découvre.
Marie L’or se dit piégée par cet homme injuste. Marie L’or et ses hommes !, adorable, se monte la tête une migraine, d’impostures. Puis elle redevient ce bébé qui ne mord pas.
Poème de Marie L’or : Je suis la petite chienne du bar
J’me fais caresser partout
Parfois, souvent j’aboie
très fort
Marie L’or
Jamais je ne mord.
Je veux que Sam découvre et consulte le Yi-king avant que je ne parte.
Il prétexte une question sur lui-même — il pose une question qu’il garde secrète — “Qu’en est-il de Pascal, de notre relation ?”
Réponse — Le pouvoir d’apprivoisement du grand.
Mon décryptage : tu tiens le navire, tes débuts et tes fins sont faibles, tu fuis, tel un recommencement, mais tu es la poutre maîtresse de toutes les situations. Chaque jour est un recommencement, un renouvellement — trésor.
Frappé, il avoue la vraie question. Je la pose à moi-même. Même réponse + le grand avoir : meilleurs oracle du “livre des transformations”.
Grand Michel m’avait dit je t’emmène en voiture au bateau. Mais en faisant beaucoup de bruit, en se manifestant en pleine activité. Une embrouille — une proposition embrouillée — sur l’air de l’homme pressé, affairé, pour reprendre comme il veut ses promesses hasardeuses. Dans beaucoup de bruit : je suis toujours en pleine activité. Sur l’instant une proposition dérapante, parce qu’il sait, qu’avec sa vitesse il récupérera. Une chose qu’on comprend pas, fait son business, son calcul.
Ainsi tu peux travailler à partir de lundi faire les peintures, dit devant tout le monde. Dans trois jours. Trois jours plus tard il me reproche que j’ai choisi lundi, que je ne suis pas pressé de travailler. Et se couvre en le disant aux tiers.

Il sait qu’il louche, à se rattraper. Et reprendre ce qu’il dit: le commerce.
J’ai peut-être halluciné “je t’emmène en voiture”. On imagine un défaut, parce qu’il se répète trop souvent.

J’ai raté mon bateau.

L’espace est courbe. Toute probabilité est courbe.

Voir = le terre est ronde = un gonflement visuel.

La nuit, la mer calme, sur la plage, se tire en tables de bois, l’une sur l’autre, régulières, scintillent au bout, à chaque frange, viennent se marier, discuter sur la précédente.

Elles arrivent l’une sur l’autre — des tranches d’espaces — bleutées.
Ce qu’on voit : une stratification courbe de la réalité.

Sami est comme moi il adore les enfants. Un môme qui rentre dans une pièce, il le dévore des yeux, heureux. Le môme tourne en rond et nous épie. Ils sont là : ceux qu’on arme pour réparer tout jugement.
Demain c’est eux.

je suis resté un jour de plus parce que Michel faisait de l’ombre au tableau de la photo. Les adieux troublés par sa présence. Je prenais Sami en photo. Lui, effraction dans le cadre de mon appareil, sourire benêt. Avoir de la reconnaissance d’être chez lui parce qu’il joue les apparences d’être chez lui ? Jaloux de Marie L’or, ignorant de Sami et Jean, vidant Christian, et moi, dont il veut disposer il ne sait comment.

Par moment une belle tête, inattendue, quand on ne s’y attend pas, lui est disponible, des moments à vous décontenancer, on avait rien à lui dire. Il se cache de profiter.


Sami solaire et caché. Il cache un soleil.
À Paris j’ai eu un trip à deviner l’inconnu dans un couloir, rentrer à l’envers par projection, au bar, comment reconnaître ces garçons et ces filles, rentrer dans ce monde de tripés, comme par effraction, tellement c’est simple ? Par l’espagnole, me disais-je. Signe et chanson de ralliement, dans les détails de vêtements, noirs, en aiguilles.
Ce soir du report du départ, Mona-belle, la seule jeune fille de la bande de copains à Sami et Jean, me parle au bar. Nous n’avions jamais pu nous dire bonjour avant, comme gênés. Elle froide, altière, incompréhensible. Ce soir automatiquement, ultime je reste, elle très douce et jolie. Dix ans qu’elle habite l’île. Chaussures noires très longues, très pointues, en aiguilles :le cœur de ces garçons.
Elle et moi sommes pris en photo. Un flash. Sans raison.
Cet acid me permettait de devenir éternel, privilégié d’être au diapason.
Sami Pierrot. Dans la cour. Saoul, contre mon épaule. Il ne manquait que la roulotte. Nus sommes tous les deux des pierrots. Nous sommes tous les deux des hippies. On rigole de nous partout. On est ravi de nous voir, tant, qu’on se fout de notre gueule. On est pas commerçant.

Boris, ris beau. Le Coluche de service est notre Lanterne. Bébé punk se défonce et bave. Très las, las. Et si on était tous comme ça ? dit Jean. Jean cherche encore, dit Sami. Je sentais une lutte entre Boris et moi, Mona au milieu départage. Mona couverte d’araignées en plastique et de Vampirella dans sa chambre, si sage. Boris, le ricanement du ricanement de tous les beaufs. Entre lui et moi, Mona choisira. C’est à moi d’y travailler. Comme Boris y travaille. Ses regards.
On aime Coluche parce qu’on aime ses défauts, les nôtres. À ça, Mona : je te répondrai plus tard. Demain.
Si je reste demain…
Moi, trop de goût à la connaissance. Mais pour y disparaître. Ris-beauf, parodie de l’inconnaissance.

Trop de paroles.

Sami, libre, depuis quatre ans dans des squats et des escaliers.
M’y baigner.
Sur le bateau : “Je suis sûr de te revoir”.

Les voyages c’est simple. N’y retrouver que des voyageurs, le Grand Michel ayant déposé son sac.

Si j’avais su m’adapter pour continuer à y vivre…
… quand j’ai entendu sa voix… non, c’est pas possible cette vois-là.
Sami et Jean jouaient aux imbéciles. Ils savaient que Michel cherchait des ouvriers. Ils se sont dit, si on joue aux affamés qui arrivent par la plage, il va penser faire une affaire et nous garder.
Michel les transporte dans le fond de sa carriole (autrefois négrier au Brésil, il s’en vante) et les présente. Sami et jean connaissent très bien. Tout ce qu’ils leur ont dit de Michel.
Sami et moi on a fait le projet :si on marchait dans un pays de montagne un jour ?
Voyager, en aimant chaque instant, délirer, trouver l’endroit, à partager la lumière reflétée — lanterne magique de chaque tête qu’on aime.
Mais j’ai fais mon choix, partir, c’était prévu. Quel possible de partir ? Je repartirai. Je le reverrai. Tous les jours. Sa grâce à partager, d’enfant nouveau-né. En souvenir y retourner, et m’y baigner chaque jour, pour l’appliquer.
Quartier de gitans à Ibiza à flancs des remparts : le soir, des petites maisons, dans la rue des femmes, les familles, les hommes en chemise autour d’un feu, pas un touriste dans ce décor africain, de récupérations, cabanes minuscules, terrasses, linge à sécher, caves sans fenêtres, réduits vivants, ruelles de la vie, juchées, jardins en torticolis…

À une pointe du port, corniche angulaire d’une maison, j’observe sans fin… le vol circulaire des oiseaux sur la ville-citadelle, comme une vieille image… je ma savais silhouetté, ma vision, ma fixité, mon intention ont fait que, je m’en doutait le pressentait leur cercle s’est agrandi, je riais ému, les oiseaux un à un se sont approchés, ont abaissé leur grande roue lente, jusqu’à moi ;manège qui se recula doucement dans l’épaule du port.
Aussitôt une nuée d’enfants pauvres ne prononcèrent qu’un seul mot : pesetas !, mirent leurs mains dans mes poches, me palpèrent.
J’ai rêve à la sécheresse de l’Espagne. Mes origines. Voyager en Espagne sur l’intuition d’y avoir vécu… Sa lumière en Rêve.
Imaginez ! Trouver men nom à Ibiza, place de la Vierge, rue de Till. Till surnom que je me donnais (de mes apparitions dans le roman photo “Yoyo” sur la transcendance entre garçons).” Dans le couloir passe Till ?” Allusion au couloir du “voyage*” emprunté.

Je sais par mon grand-père être d’une lignée de l’Aveyron. Petits seigneurs de province, au haut du Moyen-Age. Ayant nulle trace. Les aveyronnais ont tous des sourcils épais, le teint un peu mat, le profil de montagne, un air du Sud. Les princes orientaux venaient attirés par les débuts de la Renaissance. Je me croyais mage. Que j’avais un ancêtre oriental qui serait passé par l’Espagne. Ibiza, lieu de passage par excellence. Pourquoi mon grand-père est-il allé en algérie française ? Mon père attiré par le soleil, et ma sœur — du Nord par ma mère — allant vers son double comme vers la lumière, Toulouse.

Un visage très français, Galy de mon vrai nom ; gal, le coq ; et y de l’orient.

Ibiza — Grève nationale des transports. Devoir retourner à Formenterra, je vends mon billet pour le continent. À Ibiza, pris dans le circuit touristique de l’argent, du zèle, toujours. Un garçon d’Algérie m’aborde, me flatte de paroles, me rend service par la parole et demande en retour. J’ai donné. Comme s’il fallait que je donne.

La galéria — merda —se foutre de la terre — Fort !… men ! Formentera ; Fort sans terre.

Sur le plateau de l’île Formentera, vue de la mer depuis la falaise abrupte, vue circulaire, immensité, trop de mer ? Fort sans terre. En tout cas rien que celle-là.

La nuit à Ibiza, lune énorme, au ras de l’horizon.
Moi qui croyais avoir tout perdu en quittant Sami, j’ai trouvé la douceur du matin sous un arbre.

J’avais pas encore gagné l’indépendance. Tu as trop de cœur, m’a dit l’algérien, averti

Chanson :

L’eau sort du port sur la coque des bateaux
et la coque des bateaux sur l’eau !
Oh oh hissez oh !

Septiques, tout est reflet !
Michel son calme apparent, il boit pour cela, à la terrasse du café, Marie L’or à ses côtés.

Grâce au nain jaune, la bonne carte à jouer, l’albinos-fétiche qui reste sur l’île, je me retourne à Paris avec son billet en car, et avec son copain belge. Je vends des plastics-clip Josy Croire sur le marché, dans les cafés, pour le peu qui me comble, ou me manque. Je rachète mon billet du bateau. Régler mon problème à l’argent ? Mais pour constater que je n’ai rien à regretter. Face au Père et la femme complice, seuls les enfants.

Impossible de trouver l’arbre-maison près du Blue Bar. Je dors chez Boris qui cultive ses petits punks. Dans un décor mexicain la villa de maman déserte, en déroute…

De la terrasse du café en face du marché, Marie L’or vient à moi : “Tu ne sais pas compter”, (elle, elle le sait). “Je te laisse te débrouiller, tu n’es pas tout seul… …je sais ce que je fais.” (Compter veut-elle dire.)
J’ai toujours su que si elle était douce, elle faisait beaucoup d’efforts.
Les enfants ! Regarde celui-là veut jouer, se cache, il fait mine dans un coin de jouer, mais c’est pour te regarder Sami.

À la plage un petit vietnamien le slip de bain très remonté bouscule un grand de seize ans. Il est intéressé. Discret je me montre nu, il a vu, discrètement. Il s’éloigne, se cache dans un bosquet et m’observe me branler. (Trois semaines)

Marie L’or accablée, accablante. Je ne l’aime qu’indépendante. Traitée d’hystérique par l’ami financier de Michel.

J’suis trop gentil, je l’suis pas vraiment, et c’est gênant. La naïveté c’est jamais innocent. Ça gêne quèque chose avec plus de science ?

Marie L’or n’aime que son lit et ses plans. Je n’aime que mon lit et les enfants.
Sami et Jean me font faire un jeu : écrire une phrase, un groupe de mots d’après des initiales.


Q…S…J…
Quenottes sourient au jour.

Solution.

Qui suis-je ?
Qui suis-je ?

Quenottes sourient au jour.


Je leur fait faire un jeu. V…A…S… et A…P…A…

Des noms d’animaux.

Sami
Vache paisible Abeille Sauterelle
Agneau aux haricots blancs Paresseux gentil Albatros large

Jean
Varan velu Araignée habile Souris sage
Aigrette légère Pingouin planant Asticot détendu

Décidé
Vers luisant Antilope légère Serpent tentateur
Abeille saoûle Paon Âne gentil

Solution : Vie Amour Société et Amour Avant Pendant Après.


ENTRE ACTE

Un enfant m’aimait.
Il m’accompagnait, je l’accompagnais, dans une vie à tout recommencer. Le quotidien, les idées ; et l’amitié qui le confondait, l’étonnait. Moi pas étonné. J’étais. Parce qu’il était. Inséparables.
Il se croyait faible. Il me croyait fort. Le parfait. En dieu exaucé.
Si doux, doux, que je pleurerai à l’évoquer encore.

Sue une île, deux moines.
Souvenirs ineffables.

J’ai rencontré un ange.
Jean l’indispensable troisième copain permet de vivre à côté de l’ange sans que je lui saute dessus, permet d’être en accord avec mes sentiments et mes actes. Je prouvais mon amour, au lieu d’en faire douter; et je touchais mon amour, qui se laissait faire : Le visage.

Se réveiller n’importe où, là où on s’est couché la veille, et se réveiller dans les bras d’un frère, en plein air, le soleil sur une ville nouvelle, un matin nouveau.

Coincé une nuit à Barcelone, Nic le belge veut suivre des punks dans la rue, une bouteille d’alcool dans la veste. Au hasard, café fermé, buvette, gare, toujours un café, un concert Nic espère, mais dans la rue tout prétexte à s’asseoir, babils de bagarres, là où ils s’arrêtent une razzia, buvette, passants, etc. “I don’t care but I take care”, je m’en fous mais je fais attention, dit Nic. Je doutais de mon courage à affronter la ville, avec une sensibilité trop émoussée de trop d’amour ; (ou de nostalgie). Nic m’a dit “Tu as l’air trop sage”. J’ai corrigé son voleur, récupéré ma montre et son argent, quand lui partenaire punk affranchi m’impressionnait. C’est lui le timide. La chose carrée qui se fait menacer, je remet les choses en place, facile courage. Longtemps sans rien dire. J’étais grandi.

En Espagne les jeunes tout en noir sont snobs ; ils ne se doutent que légèrement du travail qu’ils font, du deuil de soi, en noir.
Enfant impressionné par la fin du film La Beauté du Diable, avec Gérard Philippe choisir une seconde vie, une roulotte et une gitane, la vie de manouche en recours du destin, la fluidité de l’amour sur les routes, sans prétention.

Volé 6000 frs de BD en trois jours, revendues au tiers 2000 frs, pour repartir.

Mange et voyage. En attendant il faut dire je ne sais pas, avant de savoir.

INTIME / récurrence

Ne pas aller au rendez-vous de l’éditeur pour Yoyo.
Rester chez soi. L’école, le travail, les autres, les activités, tout délaisser, pendant ce temps farniente, sur le lit, un peu d’herbe têtue dans les neurones, les narines dans le gazon, la tête lourde écoute les ouvriers dehors, des voix familières, intimes, d’un bon film, voix sensuelles, privées, de la télé, tout épars.
D’ailleurs le rendez-vous n’était qu’un lapin d’éditeur.

Voix éparpillées, ne rien vouloir, se laisser envahir, s’imbiber par des sources de bruits, d’ambiances qui s’usent, pour rien, tout coule.

Sami, son copain ricochet, à trois je peux apprendre. Jean de Sami réceptacle.




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