jeudi 30 avril 2009

TIENS ? QUELQU’UN QUI S’ÉCOUTE PARLER ! DE QUOI S’AGIT-IL ? DU MÊME !!

Un adolescent souffre
de ses couacs en public parce que sans
amour en privé. Il s’inquiète d’être banal
et veut être approuvé. Il se cuirasse
avec les manières des autres. Il bataille
avec les armes des autres. Et veut
persuader de ses qualités : celles sur
lesquelles on s’accorde généralement.

Il copie, multiplie les signes extérieurs
originaux, produit égoïstement des signes
aimables, Il délimite une
disponibilité, un terrain nettoyé, nourri de ses
minces expériences et en secret
cultive les coups de pieds donnés et
reçus. Il s’applique à codifier
les joies, les obligations. Il arpente,
il marche ses kilomètres de certitudes
et ne rencontre âme qui vive.

Décidé



http://www.decidemarcel.fr/

Sous-France de n’a qu’un œil

Chers séropotes, séropopos, zéros, zorros, héros… Quel sort nous est fait? La France n’est toujours pas préparée à l’épidémie du sida. Souffrance sous France. J’ai perdu l’œil gauche : historique. J’savais pas que ça pouvait arriver. Je m’ennuyais, un tel abandon! Dans l’hiver social, je ne passais pas. Seul un groupe de théâtre me soutenait, secrète rencontre, et réinventait la vie jamais finie… Au self-service des urgences, une semaine pour un rendez-vous!, dix personnes s’endorment. Le trente-sixième médecin en représentation me place en Hospitalisation à Domicile (HAD). On me refile le bébé technologique à la maison. Traumatisé je performe, infection pulmonaire, hépatite médicamenteuse, empoisonnement du sang à l’antibiotique, et mon trou noir. L’hôpital public fait des économies, préfère imaginer les patients(?) mariés, entourés, des enfants, de l’espace, de l’argent. Mais chacun est plutôt seul, pauvre et sans confort. Mes deux perfusions par jour, mes sept étages sans ascenseur, mon quotidien à gérer, invivable. Ah! Concilier une médecine douce? Boire son pipi à jeun tous les matins? Trop tard. J’en ai besoin de l’officielle, d’un bilan, de leurs médics miraculeux et surdosés, d’un balancement. Diététique, connais pas. Concilier le mépris; rapprocher les extrêmes. Il m’est plus facile d’affronter ma maladie que celle de l’institution. Pourtant j’ai réclamé l’hôpital global pour un temps, fermer les yeux, dehors!, on m’a d’abord refusé. Y a pas d’équipe. Quelles passerelles? Dans le béton ou chez moi, tout pareil. L’hospitalité, investie par une structure, un roulement impersonnel, un délire de gestionnaire, un encadrement ignorant le travail des soignants, et les soignés?
— On viendra l’après-midi ce lundi.
— À peu près entre treize et dix-neuf heures?
— À peu près.
Leur courtoisie c’est pas assez, on m’infantilise. Dans la séparation les infirmières courent après un geste mécanique sans existence avec le sourire en dessert. Elles ignorent la Solution Finale. Prisonnier des exécutants, deux pas dans ma bonbonnière ils ont tout vu, deux questions je suis tout nu, en otage, sans rendez-vous fixe, bon dernier du programme, placera-t-on l’humain au milieu? C’est quand et comment pour le dire? Ma maladie c’est du pipi. L’hôpital c’est du caca. Mon autonomie?… Il faut que je fasse ma diva. Écrire. Sans prosélytisme. Ou me taire. Sous terre. À crier. C’est plus fort que moi. Mettez l’oreille. Écoutez mon oui et mon non, la rage, l’amour amer, le bruit, le fruit fort, mort, le frère.

Pascal Galy
Paris, juin 1993


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mardi 28 avril 2009

LE MONTAGE IDÉAL | (essai) | MUR

Lac Sap Y Lag & Lecram Ecidèd
(Décidé Marcel & Pascal Galy)



LE MONTAGE IDÉAL


(essai)


MUR

CAR S’IL EN A MARRE L’HOMME, IL FAUT QU’IL DORME !


Je travaille à jouer.
Je cherchais depuis longtemps en dormant quelque mystère.


Mais il n’y a que la vie directe, sentie. Un foisonnement.


J’avais foi dans les rêves. C’est en me déplaçant, en voyageant et en dormant jusque dans une ville murale, étagée à flanc de montagne jetée abrupte dans la mer, Positano en Italie, que j’ai trouvé un début de réponse, une vision.

À parfaire une beauté lointaine entre sensation, architecture, 
et mémoire.
Le rêve d’un mur.

AH ! LA DÉMANGEAISON D’LA VISION !

1981 — POSITANO — VILLE VERTICALE EN ALVÉOLES —


Une passeuse m’invite à m’y déplacer,
m’y rejoint peut-être.

Dans un rêve, écho d’autres rêves, je ne cesse d’être hué par une bande de garçons, parmi des dunes de sable qui montent et qui descendent, je cours, j’halète, poursuivi, rattrapé. Ils s’attachent à mes pas. Le sable me freine. Le danger repoussé est imminent, invariable, angoissant et sans conclusion.

Dans mon second et fameux rêve, je conduis les foules, et les nuages, qui roulent, démiurge ou délinquant je prédis et bouscule l’ordre des choses. Tout bascule dans un moi délirant qui programme son plaisir et rît de ses farces.

Tout s’est cassé en une myriade d’éléments du rêve les plus tenaces. Et ces miettes d’instants forts du rêve qui se dénoue, brillent solitaires, vitrail éphémère.
Il raconte des gestes furtifs, des regards arrêtés, des morceaux de paysage. C’est un prisme coloré fait d’arcs, de ponts, de soleils, de fenêtres et de visages, d’idées.

Tout se rompt, tout se mêle, mes exploits, mes raisons, mes pourquoi.
Voulant se résumer ma mémoire entasse résumé sur résumé, faute de savoir quel est le meilleurs. Mais c’est que tout s’explique en autant de possibles. S’embrouille ? en un découpage de parcours.
Avant que tout ne s’évanouit il y a comme une dernière vision.
Une architecture totale composite et fragile. Tout se dissout pâle vision confondue avec la toile noire des nuits murées et muettes.
À ce rêve de Positano, citée irréelle,
je découvris plus tard une similitude au rêve de Victor Hugo, en prélude à son livre La légende des siècles.
« la vision d’où vient ce livre ». Il s’attache à sa description, « J’eus un rêve, le mur des siècles m’apparut », « ce bloc flottait ».
Un mur géant de cases vivantes, de mémoires, un édifice de multitude… « comme un arbre au zéphyr » … « trous noirs, noirs étoilés par de farouches yeux ».


Frottez vos yeux fermés. Vous avez une constellation, rosace des mystiques, dessins des cavernes des premiers hommes, motifs récurrents. D’une étoile à l’autre l’homme formalise des figures.


Représenter géométriquement les choses comme des formes évoluant dans le temps… distribuées dans l’espace et le temps… dessinées, réparties dans l’espace, répétées. Description géométrique possible de la nature. Le monde est entièrement représentable par « figures et mouvements ». Descartes.


Je parle d’un enchevêtrement qui tétanise, trop (trou) de mémoire, l’enchevêtrement des actions, des pensées de l’homme, de son corps, je parle d’une défaite, et je parle d’une euphorie, d’une enjambée plus grande, une écriture sur musique.
Un vœu pieux parce que j’entends des chuintements des vitesses ?, je vois des éclairs…
… une mise en résonance d’espaces distincts.


Découvrir l’introduction de Victor Hugo, son mur formidable, un condensé de l’Histoire, une juxtaposition d’intempéries, de pans de mémoire qui se jouent en même temps…
ses propres enchaînements (dont on (ne) peut de défaire).


La Légende des Siècles
Victor Hugo

LA VISION D’OÙ SORTI CE LIVRE

« J’eus un rêve : le mur des siècles m’apparut.

C’était de la chair vive avec du granit brut,
Une immobilité faite d’inquiétude,
Un édifice ayant un bruit de multitude,
Des trous noirs étoilés par de farouches yeux,
Des évolutions de groupes monstrueux,
De vastes bas-reliefs, des fresques colossales ;
Parfois le mur s’ouvrait et laissait voir des salles,
Des antres où siégeaient des heureux, des puissants,
Des vainqueurs abrutis de crime, ivres d’encens,
Des intérieurs d’or, de jaspe et de porphyre ;
Et ce mur frissonnait comme un arbre au zéphire ;
Tous les siècles, le front ceint de tours ou d’épis,
Étaient là, mornes sphinx sur l’énigme accroupis ;
Chaque assise avait l’air vaguement animée ;
Cela montait dans l’ombre ; on eût dit une armée
Pétrifiée avec le chef qui la conduit
Au moment qu’elle osait escalader la Nuit ;
Ce bloc flottait ainsi qu’un nuage qui roule ;
C’était une muraille et c’était une foule ;
Le marbre avait le sceptre et le glaive au poignet,
La poussière pleurait et l’argile saignait,
Les pierres qui tombaient avaient la forme humaine.
Tout l’homme, avec le souffle inconnu qui le mène,
Ève ondoyante, Adam flottant, un et divers,
Palpitaient sur ce mur, et l’être, et l’univers,
Et le destin, fil noir que la tombe dévide.
Parfois l’éclair faisait sur la paroi livide
Luire des millions de faces tout à coup.
Je voyais là ce Rien que nous appelons Tout ;
Les rois, les dieux, la gloire et la loi, les passages

Des générations à vau-l’eau dans les âges ;
Et devant mon regard se prolongeaient sans fin
Les fléaux, les douleurs, l’ignorance, la faim,
La superstition, la science, l’histoire,
Comme à perte de vue une façade noire.

Et ce mur, composé de tout ce qui croula,
Se dressait, escarpé, triste, informe. Où cela ?
Je ne sais. Dans un lieu quelconque des ténèbres.

*

Il n’est pas de brouillards, comme il n’est point d’algèbres,
Qui résistent, au fond des nombres ou des cieux,
À la fixité calme et profonde des yeux ;
Je regardais ce mur d’abord confus et vague,
Où la forme semblait flotter comme une vague,
Où tout semblait vapeur, vertige, illusion ;
Et, sous mon œil pensif, l’étrange vision
Devenait moins brumeuse et plus claire, à mesure
Que ma prunelle était moins troublée et plus sûre.

*

Chaos d’êtres, montant du gouffre au firmament !
Tous les monstres, chacun dans son compartiment ;
Le siècle ingrat, le siècle affreux, le siècle immonde ;
Brume et réalité ! nuée et mappemonde !
Ce rêve était l’histoire ouverte à deux battants ;
Tous les peuples ayant pour gradins tous les temps ;
Tous les temples ayant tous les songes pour marches ;
Ici les paladins et là les patriarches ;
Dodone chuchotant tout bas avec Membré ;
Et Thèbe, et Raphidim, et son rocher sacré
Où, sur les juifs luttant pour la terre promise,
Aaron et Hur levaient les deux mains de Moïse ;
Le char de feu d’Amos parmi les ouragans ;
Tous ces hommes, moitié princes, moitié brigands,
Transformés par la fable avec grâce ou colère,
Noyés dans les rayons du récit populaire,
Archanges, demi-dieux, chasseurs d’hommes, héros
Des Eddas, des Védas et des Romanceros ;
Ceux dont la volonté se dresse fer de lance ;
Ceux devant qui la terre et l’ombre font silence ;
Saül, David ; et Delphe, et la cave d’Endor
Dont on mouche la lampe avec des ciseaux d’or ;
Nemrod parmi les morts ; Booz parmi les gerbes ;
Des Tibères divins, constellés, grands, superbes,
Étalant à Caprée, au forum, dans les camps,
Des colliers que Tacite arrangeait en carcans ;
La chaîne d’or du trône aboutissant au bagne.


Ce vaste mur avait des versants de montagne.
Ô nuit ! Rien ne manquait à l’apparition.
Tout s’y trouvait, matière, esprit, fange et rayon ;
Toutes les villes, Thèbe, Athènes, des étages
De Romes sur des tas de Tyrs et de Carthages ;
Tous les fleuves, l’Escaut, le Rhin, le Nil, l’Aar,
Le Rubicon disant à quiconque est césar :
— Si vous êtes encor citoyens, vous ne l’êtes
Que jusqu’ici. — Les monts se dressaient, noirs squelettes,
Et sur ces monts erraient les nuages hideux,
Ces fantômes traînant la lune au milieu d’eux.
La muraille semblait par le vent remuée ;
C’étaient des croisements de flamme et de nuée,
Des jeux mystérieux de clartés, des renvois
D’ombre d’un siècle à l’autre et du sceptre aux pavois,
Où l’Inde finissait par être l’Allemagne,
Où Salomon avait pour reflet Charlemagne ;
Tout le prodige humain, noir, vague, illimité ;
La liberté brisant l’immuabilité ;
L’Horeb aux flancs brûlés, le Pinde aux pentes vertes ;
Hicétas précédant Newton, les découvertes
Secouant leurs flambeaux jusqu’au fond de la mer,
Jason sur le dromon, Fulton sur le steamer ;
La Marseillaise, Eschyle, et l’ange après le spectre ;
Capanée est debout sur la porte d’Électre,
Bonaparte est debout sur le pont de Lodi ;
Christ expire non loin de Néron applaudi.
Voilà l’affreux chemin du trône, ce pavage
De meurtre, de fureur, de guerre, d’esclavage ;
L’homme-troupeau ! cela hurle, cela commet
Des crimes sur un morne et ténébreux sommet,
Cela frappe, cela blasphème, cela souffre,
Hélas ! et j’entendais sous mes pieds, dans le gouffre,
Sangloter la misère aux gémissements sourds,
Sombre bouche incurable et qui se plaint toujours.
Et sur la vision lugubre, et sur moi-même
Que j’y voyais ainsi qu’au fond d’un miroir blême,
La vie immense ouvrait ses difformes rameaux ;
Je contemplais les fers, les voluptés, les maux,
La mort, les avatars et les métempsycoses,
Et dans l’obscur taillis des êtres et des choses
Je regardais rôder, noir, riant, l’œil en feu,
Satan, ce braconnier de la forêt de Dieu.

*

Quel titan avait peint cette chose inouïe ?
Sur la paroi sans fond de l’ombre épanouie
Qui donc avait sculpté ce rêve où j’étouffais ?
Quel bras avait construit avec tous les forfaits,
Tous les deuils, tous les pleurs, toutes les épouvantes,

Ce vaste enchaînement de ténèbres vivantes ?
Ce rêve, et j’en tremblais, c’était une action
Ténébreuse entre l’homme et la création ;
Des clameurs jaillissaient de dessous les pilastres ;
Des bras sortant du mur montraient le poing aux astres ;
La chair était Gomorrhe et l’âme était Sion ;
Songe énorme ! c’était la confrontation
De ce que nous étions avec ce que nous sommes ;
Les bêtes s’y mêlaient, de droit divin, aux hommes,
Comme dans un enfer ou dans un paradis ;
Les crimes y rampaient, de leur ombre grandis ;
Et même les laideurs n’étaient pas malséantes
À la tragique horreur de ces fresques géantes.
Et je revoyais là le vieux temps oublié.
Je le sondais. Le mal au bien était lié
Ainsi que la vertèbre est jointe à la vertèbre.
Cette muraille, bloc d’obscurité funèbre,
Montait dans l’infini vers un brumeux matin.
Blanchissant par degrés sur l’horizon lointain,
Cette vision sombre, abrégé noir du monde,
Allait s’évanouir dans une aube profonde,
Et, commencée en nuit, finissait en lueur.

Le jour triste y semblait une pâle sueur ;
Et cette silhouette informe était voilée
D’un vague tournoiement de fumée étoilée.

*

Tandis que je songeais, l’œil fixé sur ce mur
Semé d’âmes, couvert d’un mouvement obscur
Et des gestes hagards d’un peuple de fantômes,
Une rumeur se fit sous les ténébreux dômes,
J’entendis deux fracas profonds, venant du ciel
En sens contraire au fond du silence éternel ;
Le firmament que nul ne peut ouvrir ni clore
Eut l’air de s’écarter.

*

Du côté de l’aurore,
L’esprit de l’Orestie, avec un fauve bruit,
Passait ; en même temps, du côté de la nuit,
Noir génie effaré fuyant dans une éclipse,
Formidable, venait l’immense Apocalypse ;
Et leur double tonnerre à travers la vapeur,
À ma droite, à ma gauche, approchait, et j’eus peur
Comme si j’étais pris entre deux chars de l’ombre.

Ils passèrent. Ce fut un ébranlement sombre.
Et le premier esprit cria : Fatalité !

Le second cria : Dieu ! L’obscure éternité
Répéta ces deux cris dans ses échos funèbres.

Ce passage effrayant remua les ténèbres ;
Au bruit qu’ils firent, tout chancela ; la paroi
Pleine d’ombres, frémit ; tout s’y mêla ; le roi
Mit la main à son casque et l’idole à sa mitre ;
Toute la vision trembla comme une vitre,
Et se rompit, tombant dans la nuit en morceaux ;
Et quand les deux esprits, comme deux grands oiseaux,
Eurent fui, dans la brume étrange de l’idée,
La pâle vision reparut lézardée,
Comme un temple en ruine aux gigantesques fûts,
Laissant voir de l’abîme entre ses pans confus.
Lorsque je la revis, après que les deux anges
L’eurent brisée au choc de leurs ailes étranges,
Ce n’était plus ce mur prodigieux, complet,
Où le destin avec l’infini s’accouplait,
Où tous les temps groupés se rattachaient au nôtre,
Où les siècles pouvaient s’interroger l’un l’autre
Sans que pas un fît faute et manquât à l’appel ;
Au lieu d’un continent, c’était un archipel ;
Au lieu d’un univers, c’était un cimetière ;
Par places se dressait quelque lugubre pierre,
Quelque pilier debout, ne soutenant plus rien ;
Tous les siècles tronqués gisaient ; plus de lien ;
Chaque époque pendait démantelée ; aucune
N’était sans déchirure et n’était sans lacune ;
Et partout croupissaient sur le passé détruit
Des stagnations d’ombre et des flaques de nuit.
Ce n’était plus, parmi les brouillards où l’œil plonge,
Que le débris difforme et chancelant d’un songe,
Ayant le vague aspect d’un pont intermittent
Qui tombe arche par arche et que le gouffre attend,
Et de toute une flotte en détresse qui sombre ;
Ressemblant à la phrase interrompue et sombre
Que l’ouragan, ce bègue errant sur les sommets,
Recommence toujours sans l’achever jamais.

Seulement l’avenir continuait d’éclore
Sur ces vestiges noirs qu’un pâle orient dore,
Et se levait avec un air d’astre, au milieu
D’un nuage où, sans voir de foudre, on sentait Dieu.
De l’empreinte profonde et grave qu’a laissée
Ce chaos de la vie à ma sombre pensée,

De cette vision du mouvant genre humain,
Ce livre, où près d’hier on entrevoit demain,
Est sorti, reflétant de poëme en poëme
Toute cette clarté vertigineuse et blême ;
Pendant que mon cerveau douloureux le couvait,
La légende est parfois venue à mon chevet,
Mystérieuse sœur de l’histoire sinistre ;
Et toutes deux ont mis leur doigt sur ce registre.

Et qu’est-ce maintenant que ce livre, traduit
Du passé, du tombeau, du gouffre et de la nuit ?
C’est la tradition tombée à la secousse
Des révolutions que Dieu déchaîne et pousse ;
Ce qui demeure après que la terre a tremblé ;
Décombre où l’avenir, vague aurore, est mêlé ;
C’est la construction des hommes, la masure
Des siècles, qu’emplit l’ombre et que l’idée azure,
L’affreux charnier-palais en ruine, habité
Par la mort et bâti par la fatalité,
Où se posent pourtant parfois, quand elles l’osent,
De la façon dont l’aile et le rayon se posent,
La liberté, lumière, et l’espérance, oiseau ;
C’est l’incommensurable et tragique monceau,
Où glissent, dans la brèche horrible, les vipères
Et les dragons, avant de rentrer aux repaires,
Et la nuée avant de remonter au ciel ;
Ce livre, c’est le reste effrayant de Babel ;
C’est la lugubre Tour des Choses, l’édifice
Du bien, du mal, des pleurs, du deuil, du sacrifice,
Fier jadis, dominant les lointains horizons,
Aujourd’hui n’ayant plus que de hideux tronçons,
Épars, couchés, perdus dans l’obscure vallée ;
C’est l’épopée humaine, âpre, immense, — écroulée. »

Guernesey. — Avril 1857.


FLASH-BACK 1979 AMSTERDAM.

Première vision. Premiers effet de bon haschich. Une vision multipliée — un bonheur de lumières dépliées, géométriques. Aussitôt cases entachées d’un œil noir ricanant la découverte, ironique et cruel. L’idéal toujours peu pratiqué ; les paradoxes ; tout vanité dévore la vie ; et, nous jouons à faire.

Mosaïque obscurcie du devoir d’être un homme, s’appesantir d’actes. Dans cette ville-passage une jeune fille et moi voyagions sur des canaux toujours accoudés en partance sur un pont, sans bouger, hallucinés. Amsterdam le grand amour. Et un souhait de rester marginal à l’écart de la production, d’être au balcon de rebord de fenêtres à rebords de fenêtres…

Assemblage, incapable d’agir et mille éclats d’amour, je vis avec une rétention une odyssée de rêves à rebours, grande porte des portes, spectateur-captateur, sans choisir je vois le cinéma du monde.
Comment faire ?, je devais m’arranger avec le monde.
Faisant si mal je fais le fuir. À la bonne vitesse. Un bonheur architectural.

À Amsterdam, entre l’angoisse d’être sur terre et le sommeil de l’univers, il y a un chapiteau de géométries…

…une vision, un bonheur d’architecture ; un passage, une porte de la ville, une vitre-miroir, une montagne, arche, à diffractionnement, à arrangements ?, à prendre subrepticement ce diamant, la vie,
ce bonheur là, le miroir dans la ville, ses marches, ne pas les prendre, ses pierreries, moi en Arlequin-Bowie, marginal de la société, plaisir-miroir pris à la dérobée, et resté dans le mouvement, entre deux mondes, à la porte du monde… sans entrer. J’ai vu la mort, je ne supportais pas l’envahissement imposant d’un même regard juge et moqueur. J’eus peur.

J’ai vu que je voulais avoir, que je voulais prendre alors c’était affreux ! (Calculer le bonheur ?) Alors j’étais plus affreux je prendrai rien même du bonheur. (Calculs) Je suis allé à la cinémathèque à toutes les heures.


ARCHIVE


« L’un après l’autre, sur la pierre meurtrie, reviennent à ses yeux les épisodes familiers de la noble légende » KIM de Kipling.

Vision murale, optimiste, mémoire portée par l’architecture qui archive les textures d’images. Dramatiques.

L’Architecture pacifie, réunie le surplus d’images, textures à inventer, succession, hiérarchie, juxtaposition, permanence, immédiateté, simultanéité…
L’architecture résume les contradictions, être et ne pas être, il faut tout assumer, la coïncidence des contraires. Espaces intriqués d’autres espaces.
« S’il te plaît d’oublier », ce qu’on oublie toujours de relier, dont on a plus rien à foutre : une bâtisse.

Un objet absolument nouveau comme s’il se fut agi d’une bâtisse.
Gardienne des images. Musée.


Il a la tête prise entre entre ses deux mains.
Un bruit : une paroi du mur coulisse.
Une fenêtre s’ouvre.
Le regard douloureux et le front studieux
il observe son double.
Surpris, naïf, il se parle avec gravité
de son paysage ensoleillé,
et vide de tout autre silhouette que la sienne,
qui tremble au bord du cadre.
Seule sa parole se fait entendre.
Elle fabrique des images familières
et transparentes
qui s’évanouissent malignement.
Elle s’étale et couche des morts.


MONOCLE (PROJECTION)

C’est comme si j’avais fait un souhait à Amsterdam, de n’être qu’hors du social, (social : là où il n’y a pas de désirs — j’entends pouvoir inventer son travail), et je regardais toujours stupéfait ; on m’a toujours dit « tu me regarde énormément, pourquoi ? ».

Et le malin me tira à lui la couverture, à obscurcir l’architecture 
de l’esprit, à rigoler le rideau de scène, à chaque facette du diamant.
…CONSCIENCE NÉGATIVE… selon les chamans, le malade de l’esprit a son âme prisonnière quelque part, il cherche où est le mal.
À Amsterdam, de ce souhait de passer underground ; je me raptais.
Malin et voleur depuis 10 ans.

Le chacal est le guide de l’âme (Égypte).

Être conscient pour ne pas être mort.


Je me suis détaché, délivré. Seul, enfin, seul ! Au loin, béatitude, que j’aime d’autant plus tout ceux que je veille. Positano.

Ce que c’est d’avoir vingt ans, quand voulant mourir 
il ne reste que le regard.

Pèlerinage de mes lieux de défaites, de mes rues désertes, 
en border-line.

« Imaginez qu’elles me reviennent les émotions, les regards d’état lumineux de conscience, et que l’amour soit le plus fort » d’après Charles Trenet.
Tous ces moments perméables, poreux, je revois leur écho, lumières, où même les claques ne sont que les coups d’œil 
de l’éventail, des paupières.
Tout est regard.
La vision en mosaïque
comme les insectes
ou les premiers reptiles
« le troisième œil »

La mémoire, la vitesse et le temps,
en mouvements de panneaux coulissants,
frontales et à étages,
glissante dans des directions, en même temps
dans l’instant

LE MONTAGE IDÉAL.

Si on respire on a une image.
C’est à dire si on écoute, son bougé.
Respirer les variations de lumière, un gris transporté.

On recherche tous un montage idéal des sensations,
un équilibre, dans l’instant.
Par la musique la mémoire travaille au montage,

JARDIN

Architecture vivante, les pieds dans la mer ? retrouvée au hasard d’une lecture, Le monde vert (Hothouse - 1962) de Brian W. Aldiss, roman d’anticipation sur le règne végétal : des personnages trouvent une île, et une muraille d’yeux qui abrite une grotte qui régénère tout en elle, en vert, de vie.


LE MONDE VERT - BRIAN W. ALDISS, éditions J’AI LU.

« C’était comme si des millions de regards invisibles étaient braqués sur eux… se dressait une falaise abrupte, grisâtre et percée d’alvéoles… ils avaient l’impression de marcher sur le visage d’un géant endormi… -La falaise tombe sur nous !…- C’est une montagne magique… l’immense paroi paraissait plus menaçante que jamais…
…quelque chose remua. Les yeux vides - on ne pouvait plus s’y tromper : c’était bien des yeux - se mirent à tourner. Toutes ensembles les innombrables prunelles de la falaise pivotaient comme pour regarder vers la mer. Fascinés par l’intensité du multiple regard de la pierre… les eaux grises… Subitement, l’étendue marine parut se plisser. La pluie s’abattit en trombe… qui transperçait la peau… l’île - ou la falaise - donna de la voix… Le son… se répandait sur la terre et la mer à l’instar de la pluie ; chaque décibel était comme une goutte dont on éprouvait physiquement le poids… le monde s’était rétréci… Le monstre haletait… La pluie l’enveloppait de ses voiles de grisailles… on aurait dit quelque grotesque symbole de la douleur… la tour de pierre. Celle-ci était creusée d’une vaste grotte où l’empreinte du monstre menait directement, silencieuse et vide comme une bouche fixée dans éternel bâillement… ils se jetèrent dans la caverne… les yeux de pierre aux regards vigilants soulevaient leurs paupières… Les yeux de pierre continuaient à s’ouvrir en nombre toujours plus grand, dardant leurs regards vers le groupe… Alors eut lieu ce à quoi Gren donna par la suite nom de Mirage. Les yeux de la pierre étaient presque ouverts. Le temps s’arrêta… comme s’il allait prendre son vol.
…devenir la chute sans fin d’une goutte de pluie, d’un grain de sable à jamais tombant dans le sablier de l’éternité.
Atteindre enfin l’infini du non-être… l’infinie richesse de la non-existence… devenir Dieu… l’alpha et l’oméga de sa propre création… dicter sa loi à une chaîne cliquetante de mille millions de verts univers… papillonner parmi les masses incréées de matériaux vert attendant dans la vaste antichambre de l’être. …

Car il volait, bien sûr ! Ces atomes de poussières euphoriques n’étaient-ils pas les êtres… lui ou quelqu’un

… Ils voletaient dans le ravissement d’un impossible univers vert, au sein d’un élément différent de l’air, emportés par un flux hors du temps. Ils volaient dans la lumière. Ils rayonnaient de lumière. Et ils n’étaient pas seuls. Tout leur faisait cortège. La vie, simplement, s’était substituée au temps : la mort avait fui. Les horloges n’égrenaient que les heures de la fertilité.

… — un rêve… 
un rêve ayant trait à une plage de sable et à une pluie grise.

… Ils étaient entrés dans le mirage ineffable… Certitude qu’ici, il y avait assez de place pour que tout puisse croître et se développer sans obstacle et à jamais si besoin en était,

Bonheur total de s’accomplir dans ce vol sans effort, éternel, qui était l’âme même de l’être, qui était chant et qui était danse, hors du temps, hors de toute mesure et de toute souffrance. S’accomplir. Verdir…

- Admis… où celà ?
C’était tellement beau

… Quand tes lointains ancêtres étaient les maîtres, ils avaient un moyen de remédier au surpeuplement de leurs jardins : la transplantation ou le sarclage. Et voici que la nature à inventé son propre jardinier. Les rochers se sont convertis en relais. Il est probable qu’il existe des stations semblables à celle-ci le long de toutes les côtes… des stations à partir desquelles les choses presque entièrement dépourvues d’intelligence, les plantes peuvent être transplantées autre part.
— Mais où cela ?
Il y eut comme un soupir quelque part dans les corridors de son esprit.

… Oh ! perdre d’un seul coup cet inimaginable et éclatant havre de grâce…
…un million d’yeux, disant « Non », le chassaient, le repoussaient vers le monde auquel il appartenait.

… les bras en croix* sur le sable, pétrifié dans une posture qui était une cruelle parodie du vol. Il était seul. Dédaigneux, les yeux de pierre s’étaient refermés.
La pluie tombait toujours.

Oui, il faudrait fuir.

Ce monde n’était peut-être pas un paradis mais il était possible d’en tirer parti d’une certaine façon.»

*croix : voir SYMBOLES.
Se réunir pour puiser dans le cercle, ivres de points.
- Viens prendre le café chez nous.
Dormir. Pluie, pépiement. Dormir pour entendre ce qu’on sait.
La nuit, ce qu’elle essaie de me dire en dormant, la nuit se mire, seules le matin les voix interactives, confirment, compilent les mêmes fleurs.


Saint-François de Sales — INTRODUCTION À LA VIE DÉVOTE —

PRÉFACE.

Mon cher Lecteur, je te prie
de lire cette Préface pour
ta satisfaction &
la mienne.

La bouquetière Glycera savait si proprement diversifier la disposition et le mélange des fleurs, qu’avec les mêmes fleurs elle faisait une grande variété de bouquets ; de sorte que le peintre Pausias demeura court, voulant contrefaire à l’envi cette diversité d’ouvrages : car il ne sut changer sa peinture en tant de façons comme Glycera faisait ses bouquets ; ainsi le Saint-Esprit dispose et arrange avec tant de variété les enseignements de dévotion qu’il donne par les langues et les plumes de ses serviteurs, que la doctrine étant toujours une même*, les discours néanmoins qui s’en font, sont bien différents selon les diverses façons desquelles ils sont composés. Je ne suis certes, ni veux, ni dois écrire en cette Introduction, que ce qui a déjà été publié par nos prédécesseurs sur ce sujet. Ce sont les mêmes fleurs que je te présente, mon Lecteur : mais le bouquet que j’en ai fait sera différent des leurs, à raison de la diversité de l’agencement dont il est façonné.

*la même.


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LE MONTAGE IDÉAL / JARDINIER

LE MONTAGE IDÉAL


JARDINIER

Ma rencontre avec une grand-mère dans un train (et la sagesse ouverte des premières pages de Ghöguyan Trüngpa Rinpoché) m’ont donné la formule du « montage idéal »,… le montage absolu, « le point magique d’utilisation des choses. » Artaud.

Parce que j’écoutais une grand-mère gentille et envahissante, parce que mon écoute la faisait parler, artiste naïve qui aimait les jeunes, peignait des œufs de cannes, et faisait des tableaux en boutons à coudre, elle offrit aux deux jeunes garçons du compartiment et à moi son petit vin…

Je devins léger, en somme ; d’un montage d’une situation, des bouts de paysages rapides, des travellings, des reflets d’un choix, de la musique d’un plaisir.

S’abstraire de tout jugement, de tout vouloir, ne vouloir rien. Qu’écouter. Accepter.
…et le bonheur est une succession d’appréhensions faciles, de regards successivement fortuits sur les bonnes choses à voir, qui se montent avec tout à voir qui donne le bonheur.

Dans ce train, avec mamie, au retour d’une visite à mon père après 10 ans d’absence — comme quoi c’est la mémoire qui travaille — j’appelle cet assemblage mental du passé et des sensations, et de la bonne disposition aux autres, le montage idéal : dans plusieurs dimensions mais toujours ramenées à un vitrail, qui coulisse, qui ressasse, un territoire.
VITRAIL


MA ville d’enfance s’appelle Vitré.

Imaginer enfant que la main a pour continuité un rasoir, son fil immense qui coupe les maisons sur le retour de l’école, agence, ordonne. Mes mains se prolongeaient en fils invisibles, sciaient en passant les maisons.

Il n’y a que ce que à quoi on a passé son temps à —
Il y a ces temps répétés qu’on a passé à refaire. 
Les mêmes, celui-là, sont là, un temps.
Un train de paupières.

Avant de rencontrer ma grand-mère, ce qui m’avais donné la formule du montage idéal, dans le train, j’essayais de résumer cette obsession, comme quoi c’est la mémoire qui travaille, et traçait un carnet de pistes. Le montage est la clé de tout.
- mes collages de papiers (voir le chapitre CAGE)
- les villes
- l’enfance (les échos des voix) les voitures qui filent devant la maison, c’est tout ce qui me reste de l’enfance.
- le futur (découpage, pliage de la circulation)
- résurgence de surréalisme, cette erreur nécessaire : Jalons, mensuel, parodique, discours inversé droite/gauche ; lessivage des idéologies
- le rassemblement de directions velléitaires, fugitives, sur un plan déterminé, qui se détermine.
- chaque partie reliée au tout, à la fois partie et fondation, jusqu’au ressassement.
- la répétition
- le couplage et le cut, de W. Burroughs à Radio Nova, ambiguïté totale ou baroque : architecture multi-média, multiforme 
(art, arche, texture)
- la course poursuite d’un montage, de pans de vie, obstinée — des pans de rêves.
- la Vision
- tout travail
- toute machine désirante : toute cosmogonie portative
- l’ordre du monde, entre conscient et inconscient, la mathématique.
- thématique, un fil dans un labyrinthe, qu’on dévide, en reconnaissant un territoire : la dynamique, le poétique.
- l’ellipse et le recommencement : la continuité.
- …l’impossible rencontre : ça n’est jamais aussi beau qu’impossible.


L’IMPOSSIBLE RENCONTRE — ÇA N’EST JAMAIS AUSSI BEAU QU’IMPOSSIBLE.

L’OMBILIC DES LIMBES, de A. ARTAUD

« J’ai toujours été frappé de cette obstination de l’esprit à vouloir penser en dimensions et en espaces, et à se fixer sur des états arbitraires des choses pour penser, à penser en segments, en cristalloïdes, et que chaque mode de l’être reste figé sur un commencement, que la pensée ne soit pas en communication instante et ininterrompue avec les choses, mais que cette fixation et ce gel, cette espèce de mise en monuments de l’âme, se produise pour ainsi dire AVANT LA PENSÉE. C’est évidemment la bonne condition pour créer.
Mais je suis encore plus frappé de cette inlassable, de cette météorique illusion, qui nous souffle ces architectures déterminées, circonscrites, pensées, ces segments d’âme cristallisés, comme s’ils étaient une grande page plastique et en osmose avec tout le reste de la réalité. Et la surréalité est comme un rétrécissement de l’osmose, une espèce de communication retournée. Loin que j’y voie un amoindrissement du contrôle, j’y vois au contraire un contrôle plus grand, mais un contrôle qui, au lieu d’agir se méfie, un contrôle qui empêche les rencontres de la réalité ordinaire et permet des rencontres plus subtiles et raréfiées, des rencontres amincies jusqu’à la corde, qui prend feu et ne rompt jamais.
J’imagine une âme travaillée et comme soufrée et phosphoreuse de ces rencontres, comme le seul état acceptable de la réalité.
Mais c’est je ne sais pas quelle lucidité innommable, inconnue, qui m’en donne le ton et le cri et me les fait sentir à moi-même. Je les sens à une certaine totalité insoluble, je veux dire sur le sentiment de laquelle aucun doute ne mord. Et moi, par rapport à ces remuantes rencontres, je suis dans un état de moindre secousse, je voudrais qu’on imagine un néant arrêté, une masse d’esprit enfouie quelque part, devenue virtualité. »

Quand Artaud parle de la pensée, il utilise des mots, des images d’architecte. Décrit-il une mémorisation structurée, emprunte t-il un vocabulaire ? Des écrivains soudain s’attachent directement à une description visuelle d’une architecture de l’Esprit : Victor Hugo, Aldiss.
D’autres, moi aussi, empruntent ce langage, comme d’un usage, mais sérieux, toujours à découvrir, l’usage d’un mystère.

Artaud dans le Pèse nerfs,

« Le difficile est de bien trouver sa place et de retrouver la communication avec soi. Le tout est dans une certaine floculation des choses, dans le rassemblement de toute cette pierrerie mentale autour d’un point qui est justement à trouver.»
Et voilà, moi, ce que je pense de la pensée:
CERTAINEMENT L’INSPIRATION EXISTE.
Et il y a un point phosphoreux où toute la réalité se retrouve, mais changée, métamorphosée, — et par quoi ? ? — un point de magique utilisation des choses. Et je crois aux aérolithes mentaux, à des cosmogonies individuelles. »

On fait tous un montage idéal, on essaie tous de faire un montage idéal des sensations, de ce qu’on voit, une arithmétique, quand ça fonctionne, on en est conscient, c’est là qu’on est heureux, c’est ça le bonheur.
Le bonheur,

le montage inégalable - ces moments ici et maintenant, impermanents — l’ensemble, l’orchestre sont un trésor d’air et de lumière, de repos, d’où on construit, on se souvient de la vérité, sous vient — comme le tapis volant vient à nous.
Le chemin étroit tapissé.
Le reflet bombé, le renflé de l’œil ou de la terre - la vision cubiste de l’échelle (ronde) de l’espace.
La terre est ronde. Toute probabilité aussi. La courbe coupe le terreau imaginaire, un gonflement visuel.


LES MÊMES GESTES

Je ne suis que doué pour un montage perpétuel : ranger, prévoir ou fuir, découper, … en rêve j’aurais pu le dire. La plume m’assèche, réveil censure.

Un gouffre de création ; les mêmes gestes.


Des coïncidences.

Disponible, comment je vois, comment je rêve. Je fais un rapport entre l’architecture et comment ça se passe dans la tête, une architecture de cases en mouvement. Rêver ou les évolutions exactes de Eischer. Les choses ne sont pas ce qu’elle sont pures illusions mais une logique de métamorphoses perpétuelles, une consolation.
Mille projets : dormir. Avec des yeux de mouche, voir tout en 36 facettes. Flip ou humeur merveilleuse c’est le même château.
La vie et la décomposition c’est pareil. Toute moisissure, dépôt, décomposition, couche, superposition, révèle une ruche. Stratification de ce qui est en ruche de cloisonnements. Alvéoles hexagonales. Quand tu marches dans la rue en groupe, tout seul le flux des corps, et des voix, font qu’on s’assemble, s’approche, selon de subtils vases communicants, le groupe, la grappe, en arc, bouge. Être à plusieurs symbiose. Tenus par les vois qui situent les corps, l’écoute autour du plus aimé, circonférence les planètes. L’homme ‘a mysterious wheel’ (une roue mystérieuse), un feu d’artifice, un point est un bouquet de pistils de points. La vie et la décomposition c’est pareil.

Dans le café le petit garçon demande « pourquoi c’est carré les glaçons ? ». Obsédé il ouvre toute les portes du bar, et les ferme, tous des carrés, des maisons. « Pourquoi des carrés ? », il ouvre le freezer, vérifie l’eau solidifiée en ruche. Le serveur le poursuit un rond blanc d’assiette à la main, se retenant, jouant ce rond, de la main. Sur le flipper : ‘a mysterious wheel’ graphique, et les feux d’artifice, éclats de tout en un ; l’homme : la terre : boule miroitante.


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LE MONTAGE IDÉAL / CAGE

LE MONTAGE IDÉAL

CAGE

1

Persévérance de visions qui seraient mathématique figurative du temps.

Comme un poème chinois sur le vol des alouettes : « taillées et découpées dans une soir de glace. Légères et redoublées en multiples pétales, …/… qui s’étale sans faute, …/… Palais d’Étamines et de Perles*. En grand péril de s’étioler et de tomber, …/… la nostalgie …/… palais de la pensée …/. J’y retournais en rêve. » Tchao Ki

*Palais habité par les Immortelles (note d’édition)

Ma pratique du collage

PLANS NUAGES D’UNE VILLE À VIE

Des segments de pouvoirs, de caches, de parcours, de désirs, l’ambition, la compétition comme un jeu-rébus, scoubidou sale, par des arcs d’architecture, signalent la revue, le mouvement des pans de mémoire de la ville stratifiée, gelée.

La vitesse règle tout, même ce qui est immobile.

Circuit de la ville, circuit de l’enfance…
Pour le plaisir comme le musée du regard…
À plusieurs vitesse le temps architecture.
Car perpétuellement l’Ordre émiette. 
Une architecture de détails morts, une enfance usée.
Un éclatement d’écrans, articulés dans des espaces en fuites. 
Entre eux un mur de cinéma.



ÊTRE

Au milieu d’un fleuve à la pointe d’une 
île, sur un bateau traverser toute les 
villes. En succession sur le même fleuve 
qui écarte les villes concentrationnaires 
des superpositions de voyages en instants 
d’années… sous les mêmes jambes de pierre 
voir le soleil et les activités.

à Yvan octobre 1983



D’APRÈS PARIS, de LÉON-PAUL FARGUES.


Je vois des maisons à pivot qui tournent avec le soleil, je vois des quartiers démontables qui s’en vont tout seuls en voyage, je vois des camions et des voitures de cristal faire le tour des maisons, par les toits sans contact apparent.


LE PIÉTON DE PARIS.


C’était le poids toujours constant, toujours présent, et sur une seule impression, du monde entier, matières, bruits, souffles, croisillons* étranges, souvenirs … fixés sur un seul point de tourbillon. Et cependant des rois … la somme brasseuse et polymorphe vivait de son fourmillement. Tout vivait en même temps … Puis nous repartions vers les nuits infinies de nos destinées inconnues, aussi difficiles à prévoir et à définir que l’immensité bouleversante des destinées totales et simultanées de ce qui nous environne.

C’est de loin que nous avons participé aux réceptions de (…) Il se faisait devant nous une féerie de vapeurs et de chuchotements, une doux fracas d’essieux qui se confondent dans les parfums des dames et que notre imagination partageait jusqu’à des rêves infinis.

*croisillons : voir SYMBOLES


DU SITUATIONISME — ART PRESS MARS 1989 —

« Nous nous ennuyons dans la ville »
Les premiers situationnistes étaient de fervents adeptes des théories utopiques et d’inspiration surréaliste touchant à l’urbanisme. Un manifeste pré-situationniste datant de 1953 et intitulé « Formulaire pour un nouvel urbanisme » commence par ces mots : « Nous nous ennuyons dans la ville, il n’y a plus de temple du soleil » , et poursuit par la revendication d’une architecture et d’une planification urbaine quasi-surréaliste — ainsi des maisons montées sur rails et qui peuvent se déplacer pendant la journée, des murs amovibles, des plafonds rétractables : « Nous nous proposons d’inventer de nouveaux décors vivants… L’architecture de demain nous permettra de modifier les conceptions actuelles du temps et de l’espace. Ce sera un moyen de connaissance et un moyen d’action. Le complexe architectural sera modifiable. Son aspect changera en partie ou totalement suivant la volonté de ses habitants. »

« De Chirico demeure l’un des plus remarquables précurseurs de l’architecture. Il s’est attaqué aux problème des absences et des présences à travers le temps et l’espace. »


Mystère de la pierre.

Autrefois de la pierre partout, sec, des villes de pierres — Aujourd’hui d’autre matière, la vitre, Paris couverte de vitrines, quintessence de la pierre.


Jésus est un Dieu dans le désert et les plaines, un proscrit dans les villes. Jésus fait s’écrouler des yeux, du cri, sur la croix, la ville, pierre à pierre.
(L’évangile selon St Mathieu)


- Lapider un homme
- Chaque pierre de la ruche édifie l’idéal de la cité.
- Sous les pavés la plage
- La pierre dont on fait le feu.
- Tout pour le soleil, sacrifice aztèque.
- Les voûtes de pierre sont l’idéal du père, reste d’antiquité.
- Voûtes salies, la pierre c’est sale, la vitre.


Une maison de fer
Une voûte salie
Un avion y inscrit
des fils irréalité

ARCHITECTURES dans la ville, des bouts de boîtes, optimistes, obstinées, immeuble-navire, façade-regards, elles synthétisent la mémoire, du regard, aux fenêtres.
Toutes ces vies différentes, ignorées, chaque histoire qu’on ne connaît pas, toutes ces vies devinées.
En anglais les termes architecturaux empruntent au corps.
Marcher dans la rue, élire ce qu’on voit bien, de fait, en se déplaçant.


Une forteresse, dont chaque partie
recèle un continuum d’images.


Sa vie on est plusieurs à la vivre, et on se la croise.


Un rêve : une architecture merveilleuse.

On se réveille tous par intermittences ne se reconnaissant pas les uns les autres — sur un pont courbe, depuis une vieille ville mystérieuse, toute noire sur une colline, les gens sans montre et les restaurateurs dans des maisons fantômes - sur un pont courbe au dessus d’une ville, aux formes gigantesque, une ville se dévoile, un occident qui aurait digéré l’Inde.

C’est moi qui remarque tout haut que personne ne se connaît et que peut-être nous sommes dans le futur.
On se réveille chaque fois un peu plus longtemps dans des endroits différents de la vieille ville, on rejoint à pieds, par le pont suspendu, les sites qu’on connaît déjà.

Une idée de paradis.


Une ville avec des formes rondes, et organisée en étages, où circulation, habitat, sont en ceintures de ces énormes protubérances décorées.
Des cycles de vie, des caractères en un même homme se répètent.
Reviennent les mêmes temps, des grandeurs ou des abîmes.
Facettes réfléchies dans une continuité aveugle,
soubresauts visibles du serpent de mer,
en souterrains qui vibrent,
le temps revient, monstre du Loch Ness.
Mais les décisions à tous les étages rejoignent quels bras
Tissent avec les parallèles quel chant ?

On se devine (au bord) des contours seulement,
pour apaiser, suffire cette faim (d’images) de l’inconscient,
qui, distrait du compte à rebours de son im(mobilité),
calcule sans calculer, hume ce qu’il retrouve,
ébahi, encore né,
Étonné ? Mieux. Jardinier.
Travaux de mémoire, de paragraphe ludiques, d’un livre toujours
à faire.

Mais l’ordre vient de l’Ange.
Articuler, redistribuer sa part…


Il y a des séries de gens qui se ressemblent.
Il y a des symétries à tous les actes (les axes), la même chose se produisant autour de personnes-pivots.
Les ronds réverbèrent aux points croisillons des parallèles qui se croisent dans un monde rond.
Les voix voient.


*

Une science d’être qui sera plus sage.

*

Montage virtuel : l’écoute, la musique d’un plaisir.
Accepter la somme de tout.

*

Humilité : travailler avec la nostalgie.

*

Paradoxes en même temps, une respiration.


MURAL

Salut. Mille voies, sans complexes. Parler aux mille. De tout. Se savoir. Comme les milles voix d’un immeuble. Seul la nuit toutes fenêtres éclairées.

Mille projets… une générosité hystérique qui s’étiole pour se retrouver sur le carreau… c’est comme s’énerver, chamaille de frère et sœur qui s’ennuient, mère absente.

Rechercher la synthèse, rattraper quelque chose, relance.


Sensations éparses, d’oublis, bulles de savoir, toujours recommencent ; interpellé par mille vies, des durées d’éclipses ; que la vitesse, à vélo, essieu des fontaines, que la vitesse pour réconcilier, tous les bourgeons, éclatés, billes de souvenirs, immanence réalisées, dans l’axe des arbres droits, une maison accoudée, vite passer, ne pas chercher la source, l’évoquer, passer, le centre se refait, passer à travers les cerceaux et s’en défaire.


TRANSPARENCES


Le simple fait de marcher, ce que spontanément tu élis comme choses à voir en marchant dans la rue, les choses qui te plaisent, qui correspondent à ce que tu peux imaginer, il faut étudier comment 
ça se passe, la superposition même qu’on remarque 
sans la regarder, ça se lit, la succession d’événements, 
ce qui se passe, à tous les niveaux 
c’est de la transposition.
Je pars de cette constatation la plus simple.


Il ne faut rien vouloir, que les frontières, pour les traverser.



JE T’AIME POUR LA VIE QUI VA TRÈS VITE CONTRE UN MUR.


Tous les points de vue dans le bocal à fil de tes yeux, salade, confettis. Un homme marche dans la rue, derrière lui le décor change comme autant de lieux où sa mémoire se perd. Montage de ce qu’il regarde, élit spontanément le meilleur choix, le trottoir flou, d’autres points de vue absorbés, une fenêtre regardée, un corps à éviter, une voiture, un pan de mur, un tracé. Surimpression de visages (d’adolescent androgyne) il dit : tout est possible, sur tous ces visages que nous connaissons oui tout est possible. Les doubles. Décollages. Happening.

La foule se regarde dans la ville, troublant d’espaces différés, réconciliés, la mise en place des escaliers.



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LE MONTAGE IDÉAL / 2 Diamant-nuage en écharde à portée de main

LE MONTAGE IDÉAL

2

Diamant-nuage en écharde à portée de main

Vouloir, pouvoir, toutes les idées qu’on a et puis je laisse, ça traîne, je voulais j’ai rien fait, à réfléchir ça revient, je la retrouverai par le rêve ce qu’on occulte qu’on doit faire, le rappel à partir.



IMPAVIDE ET BEAUX DÉCHETS

Tout ce qu’on avait perdu et qui ne revient pas, la mémoire, les beaux déchets, l’éclatement du temps, toujours comme on fonctionne à tout instant à découvrir des sensations nouvelles, un équilibre, un alliage entre la situation et sa propre voix, un essai de respiration, un montage universel.

Tous les paradoxes sont en même temps.
On a des temps différents qui reviennent en même temps.

Le montage (idéal) virtuellement existe, cette portée musicale. Cette conscience de la musique sans la chercher tu la trouves. Si tu acceptes la perte, et donc le ravissement, un montage de pensées, un défilement visuel ressenti physiquement.
Après un joint, certaine nuit je fais un rêve machinique, une suite de claps de cinéma, de scénarios transparents et à toute vitesse, qui coulissent, trains à prendre, dans le raccord, à toute vitesse.

texture de collages transparents…

21 mai - St Constantin -
Mécanique volante de nos géométries, planes.


Détective épuisé, quelque part, (AVANT LA PENSÉE), est perdu ou renié sur les toiles des rêves, mais on reconstruit ce qui se refait, qui nous a été donné, on utilise ce qui est perdu… mémoire à étages… sublimation des déchets.
Ce travail romanesque, ce tissage autour d’un manque (Robbe-Grillet), ces déclinaisons, ces retours, ces structures de déchets, sociologiquement ça correspond, dans l’éclatement de la circulation, le sujet devient phase du circuit. (Baudrillard)
Le cinéaste Ruiz permute incessamment le dépliement de tous les possibles de toutes les fictions. Elles se bousculent, tu les aspires toujours trop vite. Un kaléidoscope.

Chez le photographe David Hockney, un puzzle de perspectives traduit notre perception de l’espace : une multitude de visions s’accordent et se choquent à l’aide de photos disjointives. « C’est ce qui se passe dans la tête, là où sont les images et les envies d’images ». (Godard)


Ça à voir avec toutes les philosophies éparses, à l’intérieur des philosophies, qu’on a pas vraiment mise à jour, qui n’a pas vraiment de nom, ses propres enchaînements… un pullulement géométrique au bord du couvercle du conscient.
…Il faudrait une grand-mère pour écouter.
L’écoute est imprimée de mémé-nuances.

Il faut être plein d’indulgence aux autres.
Si c’était tout le temps comme ça, perdu en la mobilisation continuelle faire la planche… un couplage sensoriel
visuel qui porte le bonheur.
Tout s’imbrique, dans plusieurs lieux à la fois en même temps, ce qui s’organise de lui-même dans la prospection ; tout se superpose. « J’ai encore des bribes d’images » ; abruptement comme se retrouver dans une autre rue, loin.

C’est là que je vis. Transcrire la plénitude, cette logique qui s’instaure.

CONVERSATIONS AVEC NANCY MONGAÏ, (en Maîtrise d’Art-Plastique) 1986
Une vitesse.
De la profusion.
Tout décalement en même temps.
Une grâce.
Les perspectives transgressées de Eisher.
Tout paraît logique. Une architecture.
Tu vois plusieurs dimensions, plusieurs vitesses 
dans le même moment… les voitures qui filent devant les maisons, 
je vois souvent des mécaniques, style voiture, métro, avion.
Une circulation de l’euphorie.
Si ça pouvait durer. On est tous les jours différents.
(La pensée fabrique des images familières et transparentes qui s’évanouissent malignement, elle s’étale et couche des morts.) L’inconscient se déverse, reconstruit, refait. C’est ce qui nous est donné. Tout ce qu’on avait perdu, qui revient, on l’utilise, les beaux déchets. L’ouverture de la légende des siècles parle d’une mémoire, d’une juxtaposition d’intempéries d’histoires. Un mur de beaux déchets. Des déchets qui deviennent beaux. Le passé dans une mémoire à étages, en perpétuelle action géométrique. C’est la sublimation des déchets refoulés, rejetés. Travail romanesque. Robbe-Grillet. C’est plus unique, c’est un multiple. Une polyphonie technologique. Ce qui est à craindre c’est l’hermétisme, d’un phantasme, d’images intérieures. 
À la limite d’un phantasme universel, une image, de l’inconscient et du romanesque, qui est dans tous, inespéré.

Un scénario comporte toute les époques, tout pourrait aller, se superposer à des tas de situations, ce personnage pourrait être aussi bien une femme, j’arrête pas de revoir ce scénario… des rêves lucides piétinés… ça piétine au portillon, une foule, ça rentre deux par deux, au lieu d’un par un, ils rentrent ils sortent, on les met dehors, ils reviennent. Une stratification… d’élasticités douteuses. Les yeux appuient sur des cloisons, ça vole, c’est élastique… jouer avec un reflet qui éclabousse… un système d’écrans, mécaniques… tout est secouement, brassages de lianes, alliages nécessaires… une aspiration… un kaléidoscope… tout s’est cassé en une myriade d’éléments du rêve les plus tenaces… vitrail… éphémère… le fait de savoir quel est l’agencement ou le détail le meilleur, vision fermée, mais, tout s’explique en autant de possibles, on est chaque jour différent.

Vision du rêve, du sommeil, une projection… spectrale.

En voir de toutes les couleurs.


AUTO-ROUTE

La banlieue tapis noir illuminé glisse les vitres fermées.
Un feu qui commence opaque.
Des cars s’engagent vers les suites,
barrées de lumières diffuses.
Ça vient de derrière toi. Ça file dans le paysage cosmique.
Déplacements variables toujours égaux,
découpages aux ciseaux à avaler énormes les distances.
Plus rapide que la propriété
la vitesse.
Voyager Vois-y-agé.

La vitesse, le cubisme, la polyphonie ramenée à un même moment tout le temps. Toute forme d’enchaînements, le vingtième siècle qu’in digère, cette traversée, ce travail de mémoire collectif, ce trip véritablement, un voyage, un acid dans le temps, par des mécanismes qu’on articule, qu’on intègre à des tiroirs (Dali) d’une immense bibliothèque. (Borgès).
Le Montage Idéal c’est la Vision. C’est un montage de temps isolés, permanents. Il n’y a ni passé ni futur qu’un présent qui mélange les espaces, de l’architecture à étages, ouverte…
La vision en mosaïque, privilège de la Nature, des insectes, 40 000 images à la fois, un œil derrière la tête, à droite, à gauche, en haut, en bas, avantages non pas renoncés chez les reptiles, l’automobiliste,
un coup d’œil, à autre chose en même temps.
Le montage idéal c’est un film de Godard, son enjambée plus grande que la course des machines de poubelles de bruits.
Il fait du sur-place, complexe du montage. Toujours le même questionnement : une hébétude de vivre : SOIGNE TA DROITE.
Imaginer enfant que la main a pour continuité un rasoir, fil immense qui coupe les maisons sur le retour de l’école, agence, ordonne. …le bonheur, le montage inégalable, ces moments ici et maintenant… la situation, l’ensemble, l’orchestre de la vérité sous vient. Comme le tapis volant vient à nous…
avec les hash
plus tu fumes
plus t’es dans
cet état
Couds et cuisine avec aiguille et louche,
regarde-toi te salir.
Les commissions, les dés, les paquets,
hachurent de regrets l’air-fauteuil.

Dans l’absolue carré de la chambre
va et vient vertical des libertés et des hontes.

Assis, les couches dans le ciel tendu de filins
étagent les devenir des chambres,
portes à caresser du dos, trous à faire pour se perdre,
les doigts appuient sur des cloisons d’élasticité douteuse.

Cioran dans « La chute dans le temps » déplore la connaissance arbre de la douleur, et que seuls restent les instants, encore trop ingrats. Si l’on n’est pas porté, des anciens sentiments peuvent ne pas passer, et rendre infertile l’instant propice, l’arrêter au lieu de la vivre fluide.

va plus vite, les sentiments sont une nostalgie en mémoire, le montage idéal du passé dans le présent, à plusieurs guides, mesure si sûr et passe innocent, en direction d’un chant, celui de l’instant, allié… automatique comme les rêves…

Le montage idéal c’est inconsciemment poser les jalons de ce qu’on cherche à savoir, en le cherchant, en le sachant.
Travailler sur la nostalgie, cet incompréhensible, qui n’est que du romantisme inavouable, une forme de vulgarité, une peur de la perte, mémorisée, et faire le montage de toutes les choses à la fois, dans se laisser piéger par les sentiments, avec suffisamment de cœur pour les reprendre…

Les voyages, jouer avec le temps, l’occupation des lieux en même temps, le passé, présent en nous sous forme de désertion, un escalier aux mille portes, à étages, multipliant les temps, coupe et mouvement pour porter…
Un instant peut-être l’histoire.
Tout regarder, tout est diaphane, tout s’interpénètre, tout est unanime.
Plénitude, répétitions, une mécanique respiratoire.
L’identité personnelle c’est la mémoire. L’intuition totale et immédiate de toutes les fractions du temps. Montage simultané, instantané et combinatoire.
Garder ce qui s’est tant passé, tant d’années, dans tant de villes. Liaison intime des divers moments du temps, la nostalgie… énumération des désirs. « Le style du désir est l’éternité » Borgès.

Se souvenir, à l’aventure, de son enfance inconnue.
Les échos des voitures qui passent devant la maison, c’est tout ce qu’il me reste de l’enfance.



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LE MONTAGE IDÉAL / 3 SYMBOLES

LE MONTAGE IDÉAL

3

SYMBOLES
• O +


Je vois partout sur la terre des points, des ronds, des croix, et des maisons, motifs que l’homme a laissé, semé.
S’imprime sur la terre un message aux avions.
(Notes (personnelles) de lectures)

Étoiles, un semis, immuable, inusable, inaltérable, éternel. Cieux diaprés d’étincelles en un, moi.

J’imaginais un jour que les morts étaient en petits points, fourmillement autour de la terre, essence.
Les morts tombent en pluie, la pluie c’est les morts qui tombent disaient les indiens d’Amérique.
La vision c’est les points. Le papillon est le pattern (motif récurent) qui volette, affamé de multitude.


O


Le rond, ce point agrandi. Le cercle, bonté diffuse, origine, substance et consommation de toutes choses. Une île.



« J’avais déjà fait une bonne dizaine de pas, si on peut appeler ça des pas, non pas en ligne droite bien sûr, mais selon une courbe fort prononcée, laquelle, sans peut-être me ramener précisément à mon point de départ, semblait destinée à me faire frôler de fort près, pour peu que je m’y maintinsse. Je m’étais probablement empêtré dans une sorte de spirale renversée, je veux dire dont les boucles, au lieu de prendre de plus en plus d’ampleur, devaient aller en rétrécissant, jusqu’à ne plus pouvoir se poursuivre, vu l’espace d’espèce où j’étais censé me trouver. »

L’INNOMMABLE DE BECKETT.
Manège circulaire des étoiles autour de la polaire, disque, en place, toutes les étoiles autour d’elle. Lignes concentriques répétées autour de la polaire. Impossible de distinguer les cercles astraux à notre latitude, sinon du point de vue du cercle polaire.
Les constellations interfèrent.
Plutôt que de voir la voûte céleste en disque à rayons, depuis l’axe polaire, l’homme de nos civilisations essai de déchiffrer les constellations qui interfèrent, et invente le nombre, pour compter la régularité des apparitions, disparitions, les cycles des astres, la place des étoiles.



Le temps, succession continue et invariable, course un cercle.
Ligne ondulée : création continue, monte et descend en avançant, sinusoïde, ondoyant.



Le temps ondoie en avançant comme les villages sur les collines.

Interdépendance entre le monde céleste et terrestre.
L’es pace est courbe. Toute probabilité est courbe.
Voir = la terre est ronde = un gonflement visuel.

La nuit, la mer se tire en tables de bois, l’une sur l’autre, régulières.

Elles arrivent l’une sur l’autre — des tranches d’espaces —

Ce qu’on voit = une stratification courbe de la réalité.


Einstein.
Espace courbé. Triomphe de la géométrie. Tout phénomène physique sont des régions courbées et en mouvement de l’espace. Un peu comme il en est des vagues de l’océan.
(Tout phénomène physique est de l’espace courbé en mouvement.)


Spirale, observer le ciel, ses nuages, de sa place, rotation créationnelle, tourbillon ascensionnel d’un point.
+

L’homme est un point cloué sur la croix, à l’intersection de l’espace et du temps. Symbole vieux comme le monde.



4 directions.

S’orienter dans le paysage cosmique pour s’insérer.
Plénitude de l’animalité.
L’espace est d’est en ouest, 
marqué par les levers et les couchers du soleil.
Le temps est sur l’axe de rotation du monde, 
de bas en haut, Nord-Sud.
La croisée de ces deux axes réalise la croix d’orientation totale.



(2 directions, 4 points) - (la croix et) le carré symbole de la terre.
On voit avec des points. On formalise avec des carrés (ronds cabossés). À chaque point, un croisillon. Un chiasme. Voir pages suivantes.
Carré : une extension dans 4 directions deux à deux opposées, propre structure animale perspective 4, un nombre symbole du monde matériel.


Le cercle possède une surface limitée, enclose, fermée, en commun avec le carré. Enclos, possibilité de se trouver à l’intérieur… un homme intérieur appelé centre. Le carré apparaît dans la mouvance du cercle.

Carré = cercle à 4 coins.


(Le monde engendré reflète par sa structure l’action qui l’a conduit : l’éclair, la flèche, le rayon, la pluie, le pilier : des figures de lignes droites dont la première association est l’équerre, élément de base du carré terrestre.)


Le carré relève de l’orientation fixe, ou durable, l’arrêt, l’instant prélevé, stagnation, solidification voire stabilisation dans la perfection.
La figure carré, coordonnée cartésienne, symbolise l’espace de dimension terrestre.
Réduire le paysage au temple.

Les églises sont des carrés à l’intérieur desquels les rayons lumineux tournent tout au cours de la journée.

Rond, carré = figure centrées, lieu, carrefour, nombril, passage d’un monde à l’autre, escalier rituel, échelle, du ciel à la terre.

Le ciel incommensurable, aspatial.
Le ciel-négation de la terre.

Cercle = ciel
Carré = terre
Cosmos = ensemble


Le carré apparaît au contact de la perfection transcendante, avec le crée contingent qu’elle engendre.
Intensité existentielle dans chaque interstice nodale.
Représentation plastique, et dans les églises, hauts et bas reliefs, les arceaux imbriqués caractérisent les cycles des temps terrestres. Entrelacs terrestres, temps à exorciser.

Rappel de Victor Hugo.
« Chaque assise avait l’air vaguement animée ».
« Histoire dressées ».
« Des renvois d’ombres d’un siècle à l’autre ».

« C’était une action ténébreuse entre l’homme et la création… c’était la confrontation entre ce que nous étions et ce que nous sommes ».


Totalité céleste-terrestre, s’exprime merveilleusement dans le couple cube-sphère. Valorisation. Matrice des formes idéales, invitation à la rupture de niveau.
L’espace est subordonné au temps. Faites votre signe de croix.
Un arbre… mystère de la verticalisation, croissance vers le ciel, perpétuelle régénération… un axe, rayonne.

Chiasme = (disposition en forme de croix). Procédé qui consiste en une double antithèse dont les termes sont inverses.



Un chiasme (lire kiasme), une proposition croisée du sens, à la croisée des sens (des chemins)… Dans un monde courbe les parallèles croisent, de sens croisés, en un point. Quoi qu’tu fasses à partir d’un point tu fais toujours une croix. L’homme tendance à tomber dans le point central de la croix, le trou de la mort. Quatre extrémités font un cercle. Le centre de la terre brûle tout. Toutes les possibilités, deux à deux, si tu les boucles, tu dessines le sens infini ∞
La roue porte malheur : enchaînement sur terre. La clef : croix, boucle. L’hélice c’est la providence, sinusoïdal, rejette à l’extérieur, en tournant, ses chaînes, sa force, papillon décolleur.


Dans la nuit, à priori, toute possibilité de l’homme est un chiasme, un sens infini, comme tu avances, avec l’ironie de toute limite, sens et espace croisés, possibilité s’annulent, se rejoignent, infinis, soi-même, un nœud papillon.



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