mercredi 6 mai 2009

En rêvant dans une île / Le vaisseau / Pédé / Entre acte

LE VAISSEAU
“ENTREPRISE COLONIE DE VACANCES”
CONTRE L’ARGENT
Marie L’or et Grand Michel ne rêvent que de s’installer. Jean, Sami et moi, pas du tout.
Michel souverain n’en a pas la qualité. Jaloux que les coulisses lui échappent. Chacun a sa place. Je menace son jeu, sa répartition des rôles, je passe d’un monde à l’autre. Ma copine. Mes copains. Mon hôte. Je sape son monde.
“Faut pas laisser tes affaires de toilettes près des leurs, ils vont tout saloper”, dit-elle, informée.

Je me suis fait un copain avec les deux “ouvriers”, les deux “paumés”, très spirituels à mon goût.
Elle à qui je demande si je pourrais rester travailler : “oh je ne sais pas, je ne sais rien, moi j’ai un tout autre trip, une autre aventure”… Après la panique pour me prêter un peu pour rentrer, ce qui justifie les horreurs à dire, ce qui prouve la personne, les spéciales lunettes :“j’me débrouille très star à lunettes”, elle me prête un peu d’argent avec pompe.

Et moi prêt au départ, Sami me dit, “reste dans la vieille tour en ruine, on t’apportera à manger”. Mon esprit n’est pas encore fixé, mais je veux rester. Retour de Michel. Tu peux rester deux jours, habiter avec Sami et Jean, gagner le droit de rester en aidant l’après-midi à travailler. Je suis content. amis de tout au monde. j’ai tout à apprendre d’eux. Ils sont mon maître. si j’ai prétention à instruire les garçons, c’est que d’abord ils m’instruisent.

Savoir hennir.
Veiller à la famille.
Une cabane au bord de la mer.

Je délaisse ma copine installée avce le patron, pour aller avec les garçons, aides au patron. Vacances ! Quelque soit le lieu il m’arrive toujours les mêmes choses. C’est ici exemplaire.

Eux c’est le partage, elle c’est le décompte.
J’aurais voulu être magicien.
T’as pas besoin de la magie dit Jean. Puisque tu es médium dit Muriel.
J’ai l’intuition par un détail, une couleur. pas besoin de trafic. D’ailleurs je me ferai bouffer par les esprits, dit Muriel.
Don de Salomon, l’odeur des cheveux.
Hanté de vouloir être metteur en scène.

PÉDÉ : LE GOÛT DE L’ENSEIGNEMENT ALTÉRÉ
    PAR TANT DE RÉVÉLATIONS.
Je vois là, Marie L’or faire des scènes horribles pour trois centimes à Michel, des dépenses ridicules, la peur de la perte ; que les choses ne s’écartent pas d’une méthode, qui planifie tout, la débrouille*, en argent serré.
Voyant sa grimace à propos de mon voyage pour le retour, les deux garçons s’avançaient “ML on te rembourse, Michel nous paie dans huit jours”. Elle a grogné. Le lendemain elle soupçonnait le Grand Michel d’être un imposteur, un incapable, un porc, elle le faisait vivre, il lui devait de l’argent, elle flippait, elle me disait je te hais, je te hais, Michel connu de toute l’île, et soudain elle est en péril : l’associé de Michel ne viendra pas, “je serai sans argent”.
Je lui ai dis son apparence de maîtresse-femme dure compagne du patron, qui tient son rang. Et des crises, pour le justifier tenir. Je lui ai dis, elle a engueulé violemment Michel de se comporter en patron. Elle me dit :“tu m’as ouvert les yeux sur lui”.
C’est vrai soudain j’étais un peu lourd, le Grand Michel lui devait un maximum de fric! Je me joue d’elle. Quand à moi j’avais apporté un peu d’herbe, volée à Paris, que je voulais vendre sur l’île, que j’avais offert à Sami et Jean, qu’ils voulurent m’acheter, à crédit. Je me joue de moi.
Sami et Jean travaillent l’après-midi, je m’balade dans l’île, fais les courses, royales. “Avec 2 Fr 50” dit-elle.

On est revenu par l’île malgré la laideur à touristes, l’envie pour certains d’y rester une semaine (comme moi) peut devenir douze ans.
Je suis amoureux de l’idée de l’île, goût de délaisser habitudes et géographies, pour tout réapprendre, redécouvrir sur une île, sa finitudes et ses multiples chemins, l’idée d’une île qui les réunit tous, ce point agrandi, au bout de l’Europe, avant l’Afrique.
Comme on comprend tout très vite, avec une pile de détails complexes, comme un baluchon sur l’épaule.
Ici on revit la même chose qu’ailleurs, mais avec une disponibilité autre : cette idée de répétition, d’éternel retour, dans de meilleures dispositions, fait rêver.
Rimer et rater, on peut le revivre avec un bonheur et une circonspection supérieurs.
Les allemands là où il y a le plus de monde consomment ostensiblement. Très conquérants ils achètent tout, il y en a toujours un devant toi à la caisse.
Jean
— Si on allait nettoyer les plages aux milliardaires pour trouver ce qu’ils
 perdent ?

Aux Baléares on a tout : les villages à allemands, les champs des paysans, plein de petites choses, les plages de [-]is, les ascètes.
Sami c’est la Vierge et l’Enfant réunis. Un gavroche toujours plein de potes (“un bateau avec des enfants” dans ses rêves notés). Mousse à tout faire à 17 ans dans le trafic de ma Méditerranée. Féminin (“ma sœur porte mes vêtements” dans ses rêves). Travailleur dans les champs de la Creuse. Avant tout un petit garçon qui a beaucoup zoné, qui a des tendresses, une manière de pencher le cou avec une grâce timide, “qui retient le côté négatif des choses” dit Jean, “non” dit Sami, il sait tellement de choses, quand il penche c’est pas une pose, il écoute le monde avec sa fragilité, son innocence avertie de l’écho difficile du monde. Et il est modeste, chaleureux, très doux, je voudrais rester pour lui. Je l’ai cru très fort, si fort.
Ici c’est l’Afrique. À 200 km de mer en face. Sami en rêve. Il a un côté africain. sa langueur légèrement voûtée mimétisme au paysage, est toujours en voyage. Son négligé de cheveux, de vêtements, la maison qu’il transporte, sa nonchalance, toujours sur la route, une famille avec lui, volubilité de sa voix… pérave* une épave sur les rivages flous, par choix, pour partager son savoir, de vivre.
Sami-Rimbaud
Madone secrète, ou gavroche-yoyo, Sami, sur le lit un caillou roule, ami.
Un Nain Jaune, hollandais, albinos warholien, et Nic gentil punk belge campagnard, et Mona brune îloise et française, et la frime sympathique et dangereuse d’un Coluche punk de bonne famille anglaise, au café récurrent le soir les amis de Sami et Jean.
Ici on pense toujours au voyage qu’on y fait, au voyage qu’on a fait pour venir, aux voyages qu’on a fait avant de venir, au voyage de la vie. On oublie totalement pour se le rappeler régulièrement.
Castaneda, livre-poche de Sami et Jean : les ennemis d’un homme de connaissance :

— la peur
— la clarté
— la puissance
— la vieillesse (lassitude)

Photo. Dans l’instant, posément, t’as tout ton temps. Dans l’instant.
Il y a trop de paroles. Et trop de paroles dans ma tête.
La simplicité c’est : je n’ai pas de choses neuves à dire, que la science d’être à vivre. Prend ton temps dans chaque acte, mais de suite.

Ici je parle posément français. On me répond posément en espagnol.
Ici il y a toujours du vent contre nous, dit Michel.
Je l’avais su avant, et pensé fortement comme image, je suis le vent.
Marie L’or est délicieuse, un peu cochonne. Elle est venue dans notre cabane à tous les trois avec un joint. “Je m’ennuie avec mon homme et son associé ! 50 ans ! Je peux pas, je peux pas, j’ai cru mourir, et j’ai renversé tout le déjeuner. Je ne sais pas être barmaid du bar. Et au restaurant ! Des discussions ! J’ai fui ! Ils sont pas méchants ! Mais maniaques réacs. De grands singes.
Marie L’or de retour, animée petite fille, parle de ses plans culs avec naïveté et franchise, met tout sur le même plan, au même âge d’enfant, voit avec des yeux d’enfant le monde des adultes. Conteuse.
Toujours Marie L’or dessoûlée dit je suis nulle, toujours merveilleuse.

Je lui envoyais une chanson voici longtemps :

Dans la marre
(marre ! comment fait-elle ?)
Marie cherche de l’or
Avec un tamis sa voix,
sans peur d’être noyée, attirée
par les vagues lubriques
les remous tentateurs ;
son désir
d’arriver retraitée
dans des îles ensoleillées
mémé sage pour des conseils pas sages (passages) ;
Oh c’est le nez du lapin,
le pied de l’oiseau,
soulevés, c’est le met à l’anis,
le met à l’anus ;
l’univers sert
un 15 juillet
les projets sans serres
d’une chatte
qui a vu l’envol sur terre.
Elle ne se taira plus
depuis longtemps déjà
voyage la fille
vers l’île drue
sur la mer
après qu’il ait plu.

Il y a eu justice, la juste part se recommande auprès d’eux, Sami et Jean. Le Grand Michel leur a parlé la veille, pour la première fois. Il s’étonnait que tout le monde aille vers eux.
Michel, lui est intelligent, me croise regardant obstinément le sol, alors que je cherche son regard, et m’ayant dépassé il dit de dos
— Salut ! Ça va ?
— Bonjour !, pour couper court, continuant mon chemin.
J’ai tout fait pour lui marcher sur l’extrême bord des pieds sans les écraser.
Et toujours lui ; à te poser : — “T’as un bouton là c’est quoi ?”, en riant.
Marie L’or : — “J’ai pas dit trop de choses hier ?”

Sami me dit que ça l’intéresse pas les films, les actrices, du moins il connaît pas ; pas encore. C’est : pourquoi ça ? Inutile !?
Puis lui : — J’suis libre, j’peux partir quand je veux demain ! À moi. Le premier soir seul tous les deux. Le jour où se décide que je reste encore sept jours de plus. Le soir on se couche tôt. Très tôt. On éteint.
Sami a le dictionnaire des petites fleurs et deux petites sœurs.

Le lendemain.

Sami — Pourquoi chercher la connaissance, on est pas sur la route, pourquoi créer quelque chose d’autre, et toujours, pourquoi ?
Jean — La connaissance, ressentir parfaitement, pleinement, pour un arbre, une maison, c’set tout…
Moi — Ça n’est jamais suffisant de créer… Être et ne pas être c’set aussi vrai.
“Perception instinctive réfléchie”, dit le Yi-king.
La connaissance c’est partir, et ne rien souhaiter d’eux.
Ce matin lapsus : je dis : — Tu me liras tes lèvres ? Euh tu me diras tes rêves ?
Plus tard Jean lui évoque des copains.
Sam — Celui-là je lui met un doigt dans le cul, cet autre deux doigts, ce troisième trois non quatre doigts.
Moi — Et moi ?
Sami — Pour toi je serai calmé.
La connaissance par l’inspiration immédiate du monde sans rien posséder, c’est pas suffisant, si on est pas amoureux. Le rythme du monde tu l’as si t’es amoureux, le rythme de l’amour t’apprend le rythme du monde.
Et je suis amoureux de Sami. Lui s’en fout un peu. J’en ai marre d’ici, de tous, de moi.
Ce disant je le retrouve seul dans notre maison. Et je boude. Lui ! Je veux fuir.
Sami — “T’as qu’à laisser corner* man.”
Moi — Mais c’est encore du travail.
Sami — Quand je suis amoureux, je suis impuissant.
— Je voulais partir parce que j’apprivoise toujours un enfant, pour brusquer ma demande. Mais j’apprends :“Laisse corner man !”
Je pars ou je pars pas ? Je pose en commun mon problème, la guerre à gagner, le réceptif jamais étal, l’humeur en montagnes russes. Je fuis par courage et / ou lâcheté.
Yeux de chien battu de Sami : — “Le Yi-king (livre des oracles) t’as dit de rester.”
Marie L’or m’avait dit : “C’est lui qui tient le navire ici. Il me réconforte toujours d’un regard. Avec Michel c’est lui qui aplanit tout, et fait le travail.”
C’est mon guide.
Moi — Je peux te toucher ?
Sami — Non mais je veux qu’on discute qu’on soit copain.
L’amour physique c’est bien, mais la personne est sublime, inatteignable, c’est mieux.
Moi — Oui mon amie Élisa, cousine Lili l’être que j’aime le plus au monde, j’ai pas fait l’amour avec elle, par contre j’aime lui toucher un téton. Elle dit, tiens y’a une main, ou elle l’ignore.
Mine souriante, rire même de Sam.
Trop dire les choses ça déboussole ! En dire pas trop, mais toujours assez par rapport à beaucoup.
Sami c’est une caravane qui passe. Un goût du désert.
Se laisser guider. La situation est fortuite.
Ici tout est miniature et on a tout. On comprend tout.

Marie L’or confie : l’associé de Michel est amoureux de Michel aux airs de folle, il le suit partout, lui met la main sur la cuisse. Des hommes amoureux des hommes sans le savoir — yoyo d’ado — je le découvre.
Marie L’or se dit piégée par cet homme injuste. Marie L’or et ses hommes !, adorable, se monte la tête une migraine, d’impostures. Puis elle redevient ce bébé qui ne mord pas.
Poème de Marie L’or : Je suis la petite chienne du bar
J’me fais caresser partout
Parfois, souvent j’aboie
très fort
Marie L’or
Jamais je ne mord.
Je veux que Sam découvre et consulte le Yi-king avant que je ne parte.
Il prétexte une question sur lui-même — il pose une question qu’il garde secrète — “Qu’en est-il de Pascal, de notre relation ?”
Réponse — Le pouvoir d’apprivoisement du grand.
Mon décryptage : tu tiens le navire, tes débuts et tes fins sont faibles, tu fuis, tel un recommencement, mais tu es la poutre maîtresse de toutes les situations. Chaque jour est un recommencement, un renouvellement — trésor.
Frappé, il avoue la vraie question. Je la pose à moi-même. Même réponse + le grand avoir : meilleurs oracle du “livre des transformations”.
Grand Michel m’avait dit je t’emmène en voiture au bateau. Mais en faisant beaucoup de bruit, en se manifestant en pleine activité. Une embrouille — une proposition embrouillée — sur l’air de l’homme pressé, affairé, pour reprendre comme il veut ses promesses hasardeuses. Dans beaucoup de bruit : je suis toujours en pleine activité. Sur l’instant une proposition dérapante, parce qu’il sait, qu’avec sa vitesse il récupérera. Une chose qu’on comprend pas, fait son business, son calcul.
Ainsi tu peux travailler à partir de lundi faire les peintures, dit devant tout le monde. Dans trois jours. Trois jours plus tard il me reproche que j’ai choisi lundi, que je ne suis pas pressé de travailler. Et se couvre en le disant aux tiers.

Il sait qu’il louche, à se rattraper. Et reprendre ce qu’il dit: le commerce.
J’ai peut-être halluciné “je t’emmène en voiture”. On imagine un défaut, parce qu’il se répète trop souvent.

J’ai raté mon bateau.

L’espace est courbe. Toute probabilité est courbe.

Voir = le terre est ronde = un gonflement visuel.

La nuit, la mer calme, sur la plage, se tire en tables de bois, l’une sur l’autre, régulières, scintillent au bout, à chaque frange, viennent se marier, discuter sur la précédente.

Elles arrivent l’une sur l’autre — des tranches d’espaces — bleutées.
Ce qu’on voit : une stratification courbe de la réalité.

Sami est comme moi il adore les enfants. Un môme qui rentre dans une pièce, il le dévore des yeux, heureux. Le môme tourne en rond et nous épie. Ils sont là : ceux qu’on arme pour réparer tout jugement.
Demain c’est eux.

je suis resté un jour de plus parce que Michel faisait de l’ombre au tableau de la photo. Les adieux troublés par sa présence. Je prenais Sami en photo. Lui, effraction dans le cadre de mon appareil, sourire benêt. Avoir de la reconnaissance d’être chez lui parce qu’il joue les apparences d’être chez lui ? Jaloux de Marie L’or, ignorant de Sami et Jean, vidant Christian, et moi, dont il veut disposer il ne sait comment.

Par moment une belle tête, inattendue, quand on ne s’y attend pas, lui est disponible, des moments à vous décontenancer, on avait rien à lui dire. Il se cache de profiter.


Sami solaire et caché. Il cache un soleil.
À Paris j’ai eu un trip à deviner l’inconnu dans un couloir, rentrer à l’envers par projection, au bar, comment reconnaître ces garçons et ces filles, rentrer dans ce monde de tripés, comme par effraction, tellement c’est simple ? Par l’espagnole, me disais-je. Signe et chanson de ralliement, dans les détails de vêtements, noirs, en aiguilles.
Ce soir du report du départ, Mona-belle, la seule jeune fille de la bande de copains à Sami et Jean, me parle au bar. Nous n’avions jamais pu nous dire bonjour avant, comme gênés. Elle froide, altière, incompréhensible. Ce soir automatiquement, ultime je reste, elle très douce et jolie. Dix ans qu’elle habite l’île. Chaussures noires très longues, très pointues, en aiguilles :le cœur de ces garçons.
Elle et moi sommes pris en photo. Un flash. Sans raison.
Cet acid me permettait de devenir éternel, privilégié d’être au diapason.
Sami Pierrot. Dans la cour. Saoul, contre mon épaule. Il ne manquait que la roulotte. Nus sommes tous les deux des pierrots. Nous sommes tous les deux des hippies. On rigole de nous partout. On est ravi de nous voir, tant, qu’on se fout de notre gueule. On est pas commerçant.

Boris, ris beau. Le Coluche de service est notre Lanterne. Bébé punk se défonce et bave. Très las, las. Et si on était tous comme ça ? dit Jean. Jean cherche encore, dit Sami. Je sentais une lutte entre Boris et moi, Mona au milieu départage. Mona couverte d’araignées en plastique et de Vampirella dans sa chambre, si sage. Boris, le ricanement du ricanement de tous les beaufs. Entre lui et moi, Mona choisira. C’est à moi d’y travailler. Comme Boris y travaille. Ses regards.
On aime Coluche parce qu’on aime ses défauts, les nôtres. À ça, Mona : je te répondrai plus tard. Demain.
Si je reste demain…
Moi, trop de goût à la connaissance. Mais pour y disparaître. Ris-beauf, parodie de l’inconnaissance.

Trop de paroles.

Sami, libre, depuis quatre ans dans des squats et des escaliers.
M’y baigner.
Sur le bateau : “Je suis sûr de te revoir”.

Les voyages c’est simple. N’y retrouver que des voyageurs, le Grand Michel ayant déposé son sac.

Si j’avais su m’adapter pour continuer à y vivre…
… quand j’ai entendu sa voix… non, c’est pas possible cette vois-là.
Sami et Jean jouaient aux imbéciles. Ils savaient que Michel cherchait des ouvriers. Ils se sont dit, si on joue aux affamés qui arrivent par la plage, il va penser faire une affaire et nous garder.
Michel les transporte dans le fond de sa carriole (autrefois négrier au Brésil, il s’en vante) et les présente. Sami et jean connaissent très bien. Tout ce qu’ils leur ont dit de Michel.
Sami et moi on a fait le projet :si on marchait dans un pays de montagne un jour ?
Voyager, en aimant chaque instant, délirer, trouver l’endroit, à partager la lumière reflétée — lanterne magique de chaque tête qu’on aime.
Mais j’ai fais mon choix, partir, c’était prévu. Quel possible de partir ? Je repartirai. Je le reverrai. Tous les jours. Sa grâce à partager, d’enfant nouveau-né. En souvenir y retourner, et m’y baigner chaque jour, pour l’appliquer.
Quartier de gitans à Ibiza à flancs des remparts : le soir, des petites maisons, dans la rue des femmes, les familles, les hommes en chemise autour d’un feu, pas un touriste dans ce décor africain, de récupérations, cabanes minuscules, terrasses, linge à sécher, caves sans fenêtres, réduits vivants, ruelles de la vie, juchées, jardins en torticolis…

À une pointe du port, corniche angulaire d’une maison, j’observe sans fin… le vol circulaire des oiseaux sur la ville-citadelle, comme une vieille image… je ma savais silhouetté, ma vision, ma fixité, mon intention ont fait que, je m’en doutait le pressentait leur cercle s’est agrandi, je riais ému, les oiseaux un à un se sont approchés, ont abaissé leur grande roue lente, jusqu’à moi ;manège qui se recula doucement dans l’épaule du port.
Aussitôt une nuée d’enfants pauvres ne prononcèrent qu’un seul mot : pesetas !, mirent leurs mains dans mes poches, me palpèrent.
J’ai rêve à la sécheresse de l’Espagne. Mes origines. Voyager en Espagne sur l’intuition d’y avoir vécu… Sa lumière en Rêve.
Imaginez ! Trouver men nom à Ibiza, place de la Vierge, rue de Till. Till surnom que je me donnais (de mes apparitions dans le roman photo “Yoyo” sur la transcendance entre garçons).” Dans le couloir passe Till ?” Allusion au couloir du “voyage*” emprunté.

Je sais par mon grand-père être d’une lignée de l’Aveyron. Petits seigneurs de province, au haut du Moyen-Age. Ayant nulle trace. Les aveyronnais ont tous des sourcils épais, le teint un peu mat, le profil de montagne, un air du Sud. Les princes orientaux venaient attirés par les débuts de la Renaissance. Je me croyais mage. Que j’avais un ancêtre oriental qui serait passé par l’Espagne. Ibiza, lieu de passage par excellence. Pourquoi mon grand-père est-il allé en algérie française ? Mon père attiré par le soleil, et ma sœur — du Nord par ma mère — allant vers son double comme vers la lumière, Toulouse.

Un visage très français, Galy de mon vrai nom ; gal, le coq ; et y de l’orient.

Ibiza — Grève nationale des transports. Devoir retourner à Formenterra, je vends mon billet pour le continent. À Ibiza, pris dans le circuit touristique de l’argent, du zèle, toujours. Un garçon d’Algérie m’aborde, me flatte de paroles, me rend service par la parole et demande en retour. J’ai donné. Comme s’il fallait que je donne.

La galéria — merda —se foutre de la terre — Fort !… men ! Formentera ; Fort sans terre.

Sur le plateau de l’île Formentera, vue de la mer depuis la falaise abrupte, vue circulaire, immensité, trop de mer ? Fort sans terre. En tout cas rien que celle-là.

La nuit à Ibiza, lune énorme, au ras de l’horizon.
Moi qui croyais avoir tout perdu en quittant Sami, j’ai trouvé la douceur du matin sous un arbre.

J’avais pas encore gagné l’indépendance. Tu as trop de cœur, m’a dit l’algérien, averti

Chanson :

L’eau sort du port sur la coque des bateaux
et la coque des bateaux sur l’eau !
Oh oh hissez oh !

Septiques, tout est reflet !
Michel son calme apparent, il boit pour cela, à la terrasse du café, Marie L’or à ses côtés.

Grâce au nain jaune, la bonne carte à jouer, l’albinos-fétiche qui reste sur l’île, je me retourne à Paris avec son billet en car, et avec son copain belge. Je vends des plastics-clip Josy Croire sur le marché, dans les cafés, pour le peu qui me comble, ou me manque. Je rachète mon billet du bateau. Régler mon problème à l’argent ? Mais pour constater que je n’ai rien à regretter. Face au Père et la femme complice, seuls les enfants.

Impossible de trouver l’arbre-maison près du Blue Bar. Je dors chez Boris qui cultive ses petits punks. Dans un décor mexicain la villa de maman déserte, en déroute…

De la terrasse du café en face du marché, Marie L’or vient à moi : “Tu ne sais pas compter”, (elle, elle le sait). “Je te laisse te débrouiller, tu n’es pas tout seul… …je sais ce que je fais.” (Compter veut-elle dire.)
J’ai toujours su que si elle était douce, elle faisait beaucoup d’efforts.
Les enfants ! Regarde celui-là veut jouer, se cache, il fait mine dans un coin de jouer, mais c’est pour te regarder Sami.

À la plage un petit vietnamien le slip de bain très remonté bouscule un grand de seize ans. Il est intéressé. Discret je me montre nu, il a vu, discrètement. Il s’éloigne, se cache dans un bosquet et m’observe me branler. (Trois semaines)

Marie L’or accablée, accablante. Je ne l’aime qu’indépendante. Traitée d’hystérique par l’ami financier de Michel.

J’suis trop gentil, je l’suis pas vraiment, et c’est gênant. La naïveté c’est jamais innocent. Ça gêne quèque chose avec plus de science ?

Marie L’or n’aime que son lit et ses plans. Je n’aime que mon lit et les enfants.
Sami et Jean me font faire un jeu : écrire une phrase, un groupe de mots d’après des initiales.


Q…S…J…
Quenottes sourient au jour.

Solution.

Qui suis-je ?
Qui suis-je ?

Quenottes sourient au jour.


Je leur fait faire un jeu. V…A…S… et A…P…A…

Des noms d’animaux.

Sami
Vache paisible Abeille Sauterelle
Agneau aux haricots blancs Paresseux gentil Albatros large

Jean
Varan velu Araignée habile Souris sage
Aigrette légère Pingouin planant Asticot détendu

Décidé
Vers luisant Antilope légère Serpent tentateur
Abeille saoûle Paon Âne gentil

Solution : Vie Amour Société et Amour Avant Pendant Après.


ENTRE ACTE

Un enfant m’aimait.
Il m’accompagnait, je l’accompagnais, dans une vie à tout recommencer. Le quotidien, les idées ; et l’amitié qui le confondait, l’étonnait. Moi pas étonné. J’étais. Parce qu’il était. Inséparables.
Il se croyait faible. Il me croyait fort. Le parfait. En dieu exaucé.
Si doux, doux, que je pleurerai à l’évoquer encore.

Sue une île, deux moines.
Souvenirs ineffables.

J’ai rencontré un ange.
Jean l’indispensable troisième copain permet de vivre à côté de l’ange sans que je lui saute dessus, permet d’être en accord avec mes sentiments et mes actes. Je prouvais mon amour, au lieu d’en faire douter; et je touchais mon amour, qui se laissait faire : Le visage.

Se réveiller n’importe où, là où on s’est couché la veille, et se réveiller dans les bras d’un frère, en plein air, le soleil sur une ville nouvelle, un matin nouveau.

Coincé une nuit à Barcelone, Nic le belge veut suivre des punks dans la rue, une bouteille d’alcool dans la veste. Au hasard, café fermé, buvette, gare, toujours un café, un concert Nic espère, mais dans la rue tout prétexte à s’asseoir, babils de bagarres, là où ils s’arrêtent une razzia, buvette, passants, etc. “I don’t care but I take care”, je m’en fous mais je fais attention, dit Nic. Je doutais de mon courage à affronter la ville, avec une sensibilité trop émoussée de trop d’amour ; (ou de nostalgie). Nic m’a dit “Tu as l’air trop sage”. J’ai corrigé son voleur, récupéré ma montre et son argent, quand lui partenaire punk affranchi m’impressionnait. C’est lui le timide. La chose carrée qui se fait menacer, je remet les choses en place, facile courage. Longtemps sans rien dire. J’étais grandi.

En Espagne les jeunes tout en noir sont snobs ; ils ne se doutent que légèrement du travail qu’ils font, du deuil de soi, en noir.
Enfant impressionné par la fin du film La Beauté du Diable, avec Gérard Philippe choisir une seconde vie, une roulotte et une gitane, la vie de manouche en recours du destin, la fluidité de l’amour sur les routes, sans prétention.

Volé 6000 frs de BD en trois jours, revendues au tiers 2000 frs, pour repartir.

Mange et voyage. En attendant il faut dire je ne sais pas, avant de savoir.

INTIME / récurrence

Ne pas aller au rendez-vous de l’éditeur pour Yoyo.
Rester chez soi. L’école, le travail, les autres, les activités, tout délaisser, pendant ce temps farniente, sur le lit, un peu d’herbe têtue dans les neurones, les narines dans le gazon, la tête lourde écoute les ouvriers dehors, des voix familières, intimes, d’un bon film, voix sensuelles, privées, de la télé, tout épars.
D’ailleurs le rendez-vous n’était qu’un lapin d’éditeur.

Voix éparpillées, ne rien vouloir, se laisser envahir, s’imbiber par des sources de bruits, d’ambiances qui s’usent, pour rien, tout coule.

Sami, son copain ricochet, à trois je peux apprendre. Jean de Sami réceptacle.




http://decidemarcel.free.fr/

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